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samedi 28 juillet 2012
Préface de Rudy Cambier.
Rudy Cambier, philologue écrivain, spécialiste du Moyen Age. Auteur des Centuries d'Yves de Lessines.
Éloge de la simplicité
Dans son discours de réception à l’Académie Française, Buffon énonça cette phrase étonnante : Le style est l'homme même. Vérité surprenante de paradoxe : l'art n'est-il pas toujours et partout artifice, convention, déguisement ? Bien sûr que oui ! Mais combien de fois – des centaines, des milliers ? – n'ai-je pas constaté que Buffon avait vu juste...
Car le paradoxe n'est pas là où on l'attend, pas dans l'art mais dans l'homme : le petit homme ordinaire est un petit menteur et l'homme public est un grand, un immense menteur. Telles gens qui ne parlent que de défendre ou prononcer la justice sont seulement avides et iniques ; tels politiciens ou syndicalistes qui se clament les défenseurs des petits travailleurs s'acharnent à faire grosse fortune, et vite ; telle vedette qui se construit une renommée de charmante gentillesse est, hors caméras et micros, une fort méchante rosse ; et tel don juan susurre "De toute ma vie je n'ai jamais croisé une femme comme toi" à celle qui vient de lui faire savoir en se plaignant de son homme qu'elle a envie de passer, dévêtue, une couple d'heures en présence de ce semi-professionnel de la baise subreptice. Les artistes aussi font tout cela.
Mais l'art de l'écriture est différent en ceci que Buffon avait bien perçu : lue attentivement – vraiment attentivement – toute œuvre d'écriture livre l'être intime de l'écriveur. Je vais vous donner un exemple qui est à l'exact opposé d'Annik : si vous lisez attentivement les romans de Mauriac, vous comprenez que l'auteur, qui affecte et affiche la sainteté formelle, est un sinistre faux-cul infecté de presque tous les vices que Satan, en sa malignité, créa.
Il y a un sacré bout de temps que je connais Annik. Deux images pour vous la montrer : Annik, dans la mer à Cuba, apprivoisant des dauphins jusqu'au point de les amener à venir la caresser, et Annik, quelque part en Afrique, parvenant à prendre et papouiller un lionceau à côté de la lionne qui surveille, et à portée d'un coup de griffe mortel ! Voilà donc qui est cette femme d'une force de caractère hors du commun. Par des moyens simplissimes – pas de mots, peu de gestes – elle conquiert l'âme des êtres sensibles en leur parlant avec le langage de son cœur seulement : bonté, gentillesse, générosité et simplicité.
Le style d'Annik, c'est ça : pas d'effets gratuits, pas de "m'as-tu vu écrire", pas non plus de ces collections de ficelles et de trucs qu'on enseigne dans les écoles d'écriture américaines et autres, non, rien que la simplicité. Les cuistres, je le sais d'avance, dénigreront cette manière de faire les phrases. Je vais donc répondre par avance aux méchancetés dédaigneuses qu'ils n'ont pas encore dites. Moi, je suis un vieil homme de la terre et mon style est à l'image de la terre, parfois sec comme un désert, parfois gai comme un pinson, parfois acéré et attentif comme les loups en chasse, parfois complexe comme une molécule d'ADN, parfois calme comme un bord de mare. Mon style est terrien, celui d'Annik, lui, est stellaire en ce sens que ses livres sont composés uniquement d'une accumulation d'atomes légers, et puis tout d'un coup, on s'aperçoit que ça brille, comme une étoile.
Mais seul le sage voit les étoiles...
Il me reste à remercier Annik d'avoir puisé dans mes travaux une partie de la trame de son roman car cette histoire que j'ai découverte, l'histoire vraie de sauvetage de l'Ordre du Temple manigancé par le prieur de l'abbaye cistercienne de Cambron, est tellement surprenante et tellement belle qu'elle mérite de devenir une légende.
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