Le
19 avril 1770, la jeune archiduchesse Antonia épousait par procuration
le dauphin de France, Louis-Auguste de Bourbon, petit-fils de Louis XV.
Commence alors pour la jeune fille de 14 ans un long voyage de Vienne à
Versailles. A son arrivée, si le souverain lui réserve un accueil
chaleureux, les filles de ce dernier, Mesdames de France –éternelles
célibataires- surnomment déjà la jeune Antonia « l’Autrichienne » surnom
à connotation péjorative. La jeune fille, dont le prénom a était
francisé en Marie-Antoinette, fait la connaissance de son époux : c’est
un garçon timide et effacé si on le compare à ses frères cadets les
comtes de Provence et d’Artois. Devant la beauté, le charme et la
vivacité de sa jeune épouse, Louis-Auguste reste de marbre, presque
effrayé. Le mariage où les deux conjoints sont désormais présents se
tient dans la chapelle du château de Versailles le 16 mai. Si
Marie-Antoinette semble heureuse et disposée à plaire à son mari, le
dauphin semble ailleurs, et nerveux face à la belle épousée. Le
lendemain, il court le bruit qu’il ne s’est rien passé entre les époux.
Louis XV ne s’en inquiète pas et il est de l’avis d’attendre, de laisser
faire le temps. Il faudra effectivement attendre et non pas des mois
mais des années : sept au total ! Pourquoi dons ne se passe-t-il rien
entre Louis-Auguste et Marie-Antoinette une fois les rideaux du lit
fermés ? A la vérité, il semble que la dauphine fasse peur à son époux.
Elle est vive, belle, multiplie les attentions à son égard dans les
premiers mois de leur mariage. A l’inverse, Louis-Auguste est renfermé
et très complexé. Quand son frère aîné, le duc de Bourgogne était mort
en 1761, ses parents avaient dit que la mort « s’était trompée de
personne » car le jeune Louis-Auguste était à l’époque souffrant lui
aussi. Après ce drame, toute la cour avait le regard posé non sur lui,
mais sur ses frères : Louis-Stanilas de Provence très mûr pour son âge
et Charles, le petit dernier très enjoué. On semblait regretter que le
comte de Provence ne soit pas né avant Louis-Auguste alors duc de Berry.
Seul son grand-père Louis XV et sa petite sœur Elisabeth lui montraient
un réel attachement. Louis-Auguste en ait venu à se sentir inférieur
aux autres tandis que son épouse se met en avant. De plus la défunte
mère du dauphin, Marie-Josèphe de Saxe, s’était opposée jusqu’à sa mort
en 1767 à l’union de son fils avec une princesse membre de la famille
des Habsbourg. De ce fait, les tantes de Louis-Auguste, Mesdames
Adélaïde, Victoire et Sophie, ont fait naître chez le jeune homme un
sentiment de méfiance envers sa femme : celle-ci, cette « Autrichienne »
n’est en France qu’en tant qu’espionne à la solde des Habsbourg. Cela
ne favorise en rien un rapprochement entre le dauphin et
Marie-Antoinette. De plus, leur emploi du temps et leurs passions sont
très différentes : il aime lire, se lève tôt pour aller à la chasse et
par conséquent, se couche tôt ; elle ne lit pas, préfère la danse et la
musique, se couche tard après avoir danser ou assister à un opéra et
aime les fêtes, la foule. Cependant il faut un héritier à la France et
pour assurer sa position à la cour, Marie-Antoinette doit donner un fils
à son époux.
Le
10 mai 1774, Louis XV s’éteint. A cette nouvelle, les nouveaux
souverains, Louis XVI et Marie-Antoinette prient ensemble « Seigneur
guide-nous car nous régnons trop jeunes ». Déjà quatre années de mariage
et toujours pas de grossesse pour Marie-Antoinette. De Vienne, sa mère
l’impératrice Marie-Thérèse lui envoie lettre sur lettre dans lesquelles
elle donne des conseils à sa fille. Elle déplore également que la reine
de France monte à cheval, acte dit néfaste à l’époque aux grossesses.
Le 6 août 1775, la comtesse d’Artois, mariée depuis moins de deux ans au
frère de Louis XVI, met au monde un garçon, le petit duc d’Angoulême.
C’est une douche froide pour Marie-Antoinette qui en tant que reine
aurait voulu donner naissance au premier prince de la nouvelle
génération. Si le couple royal n’arrive pas a procréer, chacun se
demande à qui la faute : Louis XVI est-il impuissant ou Marie-Antoinette
est-elle stérile ? Le roi et la reine voient plusieurs médecins et il
en ressort que Louis XVI devrait subir une légère intervention
chirurgicale mais cela effraye le souverain. En dernier recourt, le
frère de la reine, l’empereur Joseph II vient à Versailles en 1777 afin
d’analyser au mieux la situation du couple. A Marie-Antoinette, il fait
quelques reproches : elle doit se ménager, elle n’a plus l’excuse de la
jeunesse pour faire passer ses caprices, elle se doit d’avoir des
enfants. Joseph II parle ensuite à son beau-frère à qui il donne des
conseils avisés. En quittant Versailles, l’empereur peut écrire à sa
mère et à son frère Léopold que tout est normal au sein du couple et que
le roi et la reine de France « sont deux maladroits ». Il prédit que
désormais « la grande œuvre » peut s’accomplir.
Et
effectivement, en août de la même année, Marie-Antoinette peu écrire à
sa mère qu’elle a bon espoir d’être bientôt enceinte. Cet enfant tant
attendu viendra le 19 décembre 1778 mais ce ne sera pas un dauphin. La
reine donne naissance à une petite princesse, Marie-Thérèse-Charlotte
dite Madame Royale. Mais si le bébé n’est qu’une fille, Marie-Antoinette
prouve néanmoins qu’elle est capable de porter des enfants. Elle sera
encore enceinte à cinq reprises : après une fausse-couche en 1779,
l’héritier tant désiré –le dauphin Louis-Joseph- naîtra en 1781.
Nouvelle fausse-couche en 1783 suivit de deux autres naissances en 1785
et 1786 : celle du futur Louis XVII et de la petite Sophie.