vendredi 18 janvier 2013

Frédégonde la reine sanguinaire.

Frédégonde, la reine sanguinaire
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Ecrit par Constance Cousin   
06-01-2007
Frédégonde et Chilpéric Ier (539-584), illustration du XIXe siècle.
Frédégonde et Chilpéric Ier (539-584), illustration du XIXe siècle.
La seconde moitié du VIe siècle va être marquée par la rivalité entre deux reines, les célèbres Frédégonde et Brunehaut, rivalité qui bouleversera à maintes reprises la donne politique. De cette époque, l’histoire a retenu la multitude des crimes, des intrigues et des méfaits de Frédégonde qui, dès le Moyen Âge, acquiert le qualificatif de « reine sanguinaire ».
À la mort du dernier fils du roi Clovis et de sainte Clotilde, Clotaire Ier, qui avait réussi à unifier le royaume franc, celui-ci est, selon la coutume franque, divisé entre les fils du roi, d’abord en quatre puis en trois à la mort de l’aîné, Caribert. Gontran obtient ainsi la Burgondie, avec Orléans pour capitale, Sigebert reçoit l’Austrasie et s’établit à Reims et Chilpéric, le plus jeune, hérite du royaume de Neustrie, Soissons étant la capitale. Paris reste dans l’indivision et peut être occupée à tour de rôle.
Un tel partage ne pouvait que faire naître les difficultés et les convoitises, notamment de la part de Chilpéric qui avait reçu la plus petite part et qui n’était pas d’un caractère particulièrement soumis. Cependant, ce qui va déclencher la terrible vendetta qui, de 566 à la fin du VIe siècle, allait ensanglanter la cour et tout le royaume fut la jalousie. D’abord celle de Chilpéric envers son frère Sigebert puis celle de Frédégonde… envers tout le monde !
 
Les couronnes des souverains wisigoths.
Les couronnes des souverains wisigoths.
Contrairement à ses deux frères qui vivaient dans la débauche et qui épousaient volontiers des femmes de la plus basse extraction, Sigebert avait une haute idée de son rang et ne désirait qu’une épouse de sang royal. Il la trouve en Espagne, alors royaume wisigoth, en la personne de la belle Brunehaut.
C’était, raconte Grégoire de Tours, une jeune fille de manières élégantes, belle de figure, honnête et décente dans ses mœurs, de bon conseil et d’agréable conversation.
Bref, l’opposé absolu des femmes avec qui vivaient ses chers frères. Et, Sigebert, qui décidément était l’exception de la famille, désirait vraiment être fidèle à son épouse.
Les réjouissances ordonnées par le roi d’Austrasie pour célébrer son union avec une princesse de si haut rang allaient raviver la jalousie de son frère Chilpéric.
Ce dernier avait épousé Audovère, dont il avait eu trois fils, et vivait avec une servante de la reine, une Franque du nom de Frédégonde. Mais qu’était une servante, aussi belle et intelligente fût-elle, face à l’orgueil démesuré de Chilpéric ? Voyant Sigebert honoré pour son illustre mariage, Chilpéric décide tout simplement de l’imiter ! Il renvoie -officiellement- épouse et concubines et demande la main de Galswinthe, la sœur de Brunehaut. Là encore, Chilpéric révèle son caractère jaloux et infantile : son mariage est fastueux, splendide, bref, supérieur en tous points à celui de Sigebert ! Le roi entoure sa nouvelle épouse de toute la tendresse dont il est capable ; il loue sa vertu… jusqu’à ce qu’il se lasse de jouer au bon mari. Galswinthe était parfaite, certes, mais elle l’ennuyait à mourir !
En épousant Galswinthe, le roi avait promis de se séparer de ses femmes. Et en effet, il avait répudié Audovère et l’avait enfermée dans un couvent. Mais Frédégonde, elle, était restée à la cour au service de la nouvelle reine. Patiente, elle attendait dans l’ombre ce qu’elle savait inéluctable : le retour du roi dans sa couche.
La reine est morte, vive la reine !
Galswinthe, profondément affectée par la trahison de Chilpéric, désire se retirer. Le roi pouvait garder son douaire, peu lui importait. Tout ce qu’elle voulait, c’était retourner chez son père. La solution convenait sans doute tout autant à Frédégonde qu’à Galswinthe, mais Chilpéric voulait garder le prestige de son mariage. Et, de son côté, Frédégonde était résolument contre un quelconque partage du lit royal. Peu après, la malheureuse Galswinthe est trouvée dans son lit, étranglée. Ce fut le premier crime…
Après quelques jours de deuil, réduits au strict minimum, où il pleure amèrement la jeune femme, Chilpéric épouse Frédégonde. Cet événement allait être le prélude à plus de trente ans de guerre et de rivalité.
En apprenant la mort de sa belle-sœur, Sigebert entre dans une colère noire. Chilpéric méritait un châtiment exemplaire…
En l’année 568, Sigebert rassemble ses armées et fait appel à son frère Gontran, roi de Burgondie, qui voyait là l’occasion de dépouiller le frère maudit de ses domaines. Selon les dires de Grégoire de Tours, les deux souverains avait tout simplement prévu de détrôner Chilpéric. Mais Gontran n’aimait pas particulièrement faire la guerre -chose curieuse pour un Mérovingien- et, après quelques escarmouches, il se fait diplomate et convainc ses frères de se présenter devant le Mâl, un tribunal de leudes.
Chilpéric fait amende honorable et accepte de rendre le douaire de la pauvre Galswinthe qui revient alors à sa sœur, Brunehaut. Tout rentrait dans l’ordre.
Quatre ans plus tard, les fils de Chilpéric étant désormais en âge de conduire les armées, le roi de Neustrie décide de récupérer le douaire de Galswinthe. Il lance ses fils contre les armées de Sigebert… qui les écrase sans difficulté. Il avait fallu de longs mois et plus d’une traîtrise pour décider Sigebert à se défaire de son frère définitivement, mais l’avancée de son armée fut telle que, en 575, Chilpéric et Frédégonde durent se réfugier dans Tournai assiégée. Brunehaut, qui avait été privée de sa vengeance quatre ans plus tôt, la tenait enfin… C’était compter sans l’extraordinaire sens de la manipulation de Frédégonde.
« Si tu y vas dans l’intention de ne pas tuer ton frère… »
Frédégonde armant ses sicaires (illustration du XIXe siècle).
Frédégonde armant ses sicaires (illustration du XIXe siècle).
Alors qu’il marchait à la tête de ses troupes contre Chilpéric, Sigebert s’était entretenu avec l’évêque saint Germain qui l’avait mis en garde :
-Si tu y vas dans l’intention de ne pas tuer ton frère, tu reviendras vivant et vainqueur ; mais si tu as d’autres pensées, tu mourras.
Sigebert, poussé par la haine, méprisera les conseils du saint homme. Et c’est Frédégonde qui accomplit la prophétie : convoquant deux jeunes leudes tout dévoués à sa famille, elle les arme de scramasaxes -les longs poignards francs- à la lame empoisonnée. Leur mission : tuer Sigebert ! Ce qu’ils font près de Vitry.
La mort de Sigebert jette l’effroi dans les rangs de l’armée austrasienne qui se disperse laissant le corps de son roi à l’abandon et Brunehaut seule dans Paris.
Chilpéric, sauvé par le crime de sa femme, poussa l’hypocrisie jusqu’au bout : il s’empara de l’un des meurtriers, le fit torturer et enfin tuer puis, récupérant la dépouille de Sigebert, il lui rendit, en larmes, les derniers honneurs…
Le rêve de vengeance de Brunehaut s’écroulait. Pire, elle était prisonnière de Chilpéric. Seul son fils Childebert, âgé de cinq ans, avait pu échapper à son oncle, quittant Paris caché dans un panier à provisions… La reine d’Austrasie exilée à Rouen, ses filles reléguées dans un couvent de Meaux, Chilpéric enrichi par le trésor de sa belle-sœur et Childebert II trop jeune pour se venger : la guerre fratricide allait s’éteindre faute de prétendant…
Mais Brunehaut, âgée d’à peine vingt-huit ans, était très belle et Mérovée, le fils de Chilpéric, en âge de tomber amoureux… Chargé par son père de conduire Brunehaut à son exil rouennais, Mérovée succombe au charme de l’altière princesse wisigoth et l’épouse.
C’est le moment que choisissent les Austrasiens pour assiéger Soissons : Frédégonde, en fuite, rejoint le roi à Rouen et lui révèle que cette attaque est le fruit d’un complot entre les Austrasiens et… Mérovée ! Pour prix de sa trahison, ce dernier est déchu de ses droits à la succession, tonsuré et exilé. Il s’enfuit et rejoint Brunehaut qui a pu gagner l’Austrasie… Mais les malheurs du jeune prince ne sont pas encore finis : soupçonné par les leudes austrasiens de vouloir s’emparer du pouvoir, il est obligé de s’exiler à nouveau. Errant de ville en ville, vivant caché, le pauvre Mérovée croit voir enfin une porte de sortie quand quelques nobles viennent le trouver et le décident à renverser son père. L’aventure s’arrête soudain quand Mérovée apprend que les leudes en question sont au service de la reine Frédégonde qui, lasse de chasser cette proie, a décidé de porter l’estocade. Désespéré, Mérovée se suicide en 578.
Une fois de plus, Frédégonde a réussi son coup. Son beau-fils Théodebert était mort sur le champ de bataille en 575 ; Mérovée, grâce à un savant complot, venait de mourir ; il ne restait plus que Clovis et le trône reviendrait à ses propres rejetons…
Le mea culpa de Frédégonde
Mais avant même que la « reine sanguinaire » ne s’occupe du « cas » de son dernier beau-fils, une série de cataclysmes s’abat soudain sur le royaume : les fleuves débordent, Orléans est ravagée par un incendie, Bordeaux touchée par un tremblement de terre et une épidémie de variole s’étend sur Paris. Les deux fils de Frédégonde, Clodebert et Dagobert, sont touchés.
Désespérée, Frédégonde est saisie de remords -tardifs il est vrai- et dit au roi, selon Grégoire de Tours :
-Voilà trop longtemps que la miséricorde divine supporte nos mauvaises actions ; elle nous a souvent frappés de fièvres et d’autres maux et nous ne nous sommes pas amendés. Voilà que nous perdons nos fils ; voilà que les larmes des pauvres, les gémissements des veuves, les soupirs des orphelins les font périr et il ne nous reste plus d’espérance d’amasser pour personne ; nous thésaurisons et nous ne savons plus pour qui… Maintenant, si tu veux, allons brûler ces injustes registres… Fais ce que tu me vois faire, afin que, si nous perdons nos chers enfants, nous échappions du moins aux peines éternelles !
Ce fut peine perdue et les deux jeunes princes périrent. Ces derniers enterrés, Frédégonde retrouve la bonne vieille haine d’autrefois. Elle avait perdu ses fils ? Eh bien, elle perdrait le dernier rejeton d’Audovère !
Voilà donc que Frédégonde accuse Clovis d’avoir empoisonné ses fils et de vouloir éliminer Chilpéric et sa femme. D’ailleurs, sa maîtresse, une sorcière reconnue, l’a avoué… après quelques heures passées en compagnie du bourreau ! Chilpéric, décidément aveuglé par sa peur pathologique du complot et sous l’emprise totale de son épouse, livre le jeune homme aux douces mains de sa belle-mère. Quatre jours de torture ne feront rien avouer au jeune prince qui finit tout de même assassiné… Mais ce n’était pas encore suffisant pour assouvir la colère de Frédégonde : elle fait assassiner la pauvre Audovère, reléguée depuis des années dans un couvent avec sa fille Basine.
Résultat : Chilpéric n’a plus aucun héritier ! Heureusement, Frédégonde était féconde et, dans l’année qui suit, elle lui donne un autre fils, Thierry… qui devait mourir à son tour en 584. L’événement a son importance : une fois de plus, Chilpéric se retrouve sans fils et, une fois de plus, Frédégonde fait passer sa colère sur des innocents. Elle fait arrêter à Paris des dizaines de femmes, les accusant de sorcellerie, les fait torturer et mettre à mort. Seule la naissance d’un petit Clotaire fera cesser ces horreurs…
« Il n’a jamais aimé vraiment personne et personne ne l’a aimé »
Chilpéric avait enfin un héritier et songeait au prochain mariage de sa fille Rigonde avec un prince wisigoth quand, un soir de 584, alors qu’il revenait de chasse dans la forêt de Chelles, il est assassiné.
Il a dévasté et incendié de très nombreuses provinces. Il n’en éprouvait nul chagrin, mais au contraire de la joie, comme jadis Néron quand il déclamait une tragédie devant l’incendie de Rome. Il était porté à la gloutonnerie, car son dieu était son ventre… Il détestait les intérêts des pauvres. Il blasphémait sans arrêt contre les prêtres du Seigneur… En ce qui concerne la débauche et la dépravation, il est impossible d’imaginer un excès qu’il n’ait pas commis. Il se plaisait à trouver des coupables et leur faisait arracher les yeux. Il n’a jamais aimé personne et personne ne l’a jamais aimé.
Tel est le jugement, sans appel, que Grégoire de Tours a porté sur le roi Chilpéric. Lisant ces lignes, il paraît même incroyable que Chilpéric n’ait pas été assassiné plus tôt. Mais qui a commandité ce meurtre ? Certains ont prétendu que c’était Frédégonde, parce que le roi l’avait surprise avec un de ses leudes, Landry, dans une attitude plutôt compromettante. Et on avait déjà accusé la reine de tant de crimes, alors, un de plus ou de moins. D’autres ont avancé le nom de Brunehaut… Qui sait ? Ce qui est sûr, c’est qu’avec la mort de Chilpéric, Frédégonde se trouve en grande difficulté : régente pour son fils âgé d’à peine quatre mois, elle vient surtout de perdre son meilleur protecteur !
« Tu seras maudite dans les siècles ! »
À peine a-t-elle appris le meurtre de son mari que Frédégonde entasse vite fait ses richesses dans des chariots et se réfugie à Paris, où elle se place d’abord sous la protection de l’évêque puis sous celle de Gontran, son beau-frère.
Frédégonde connaissait suffisamment le roi des Burgondes pour savoir qu’il ne pourrait refuser son aide à un enfant, héritier de la race des rois chevelus. De plus, ce serait pour lui l’occasion de mettre la main, même indirectement, sur le royaume de Chilpéric. Les beaux sentiments de Gontran serviraient grandement les desseins de la reine sanguinaire…
Il n’en fallait pas moins pour arrêter Childebert qui réclamait vengeance :
-Rends-moi la femme homicide qui a assassiné ma tante, mon père, mon oncle et mes cousins !
Gontran ne cède pas… pour la plus grande joie de Frédégonde qui peut ainsi reprendre ses « activités ».
Les premiers à en faire les frais seront Childebert, qui commençait sérieusement à inquiéter Frédégonde, et… Gontran lui-même ! Le complot échoue mais Gontran, naïf, continue à la protéger.
Assassinat de l'évêque Prétextat (illustration du XIXe siècle).
Assassinat de l'évêque Prétextat (illustration du XIXe siècle).
L’évêque Prétextat, qui avait jadis accusé Frédégonde de certains crimes et qui avait béni le mariage de Mérovée et de Brunehaut, n’aura pas la même chance… Cela se passait le jour de Pâques 586 :
Le jour de la Résurrection de Notre-Seigneur étant arrivé, relate Grégoire de Tours, alors que l’évêque s’était rendu de bonne heure à la cathédrale pour y accomplir les offices de l’Église et commençait à entonner les antien-nes selon l’ordre accoutumé, dans un moment où, entre les psaumes, il était appuyé sur sa chaire, un meurtrier s’approcha de lui et, tirant un couteau de sa ceinture, le frappa… Rempli de sang, il étendit ses mains sur l’autel, offrit à Dieu son oraison, lui rendit grâce puis, emporté chez lui dans les bras des fidèles, il fut placé sur son lit. Aussitôt, Frédégonde vint le voir et lui dit :
-Nous n’aurions pas voulu, ô saint évêque, non plus que le reste de ton peuple que, pendant l’exercice de tes fonctions, il t’arrivât une telle chose. Mais plût à Dieu qu’on pût nous indiquer celui qui a osé la commettre afin qu’il subisse le supplice que mérite semblable crime !
Le prêtre, connaissant la fourberie de ces paroles, lui dit :
-Et qui l’a commise si ce n’est celle qui a fait périr des rois, qui a si souvent répandu le sang innocent, qui s’est couverte de tant de crimes en ce royaume ?
Et il ajouta :
-Les ordres de Dieu m’ont rappelé de ce monde. Toi, que chacun connaît pour être la source de tous les crimes, tu seras maudite dans les siècles et Dieu vengera mon sang sur ta tête !

Frédégonde s’affole
Tombeau de Frédégonde.
Tombeau de Frédégonde.
Mais voilà que Gontran et le jeune Childebert s’allient et que le roi de Burgondie fait de son neveu son héritier. Pour Frédégonde, c’est une catastrophe. Affolée, la reine tente le tout pour le tout. En vain… Gontran échappe à deux tentatives d’assassinat tout comme Childebert. Et bien que le commanditaire ne fasse guère de doute, Frédégonde continue de profiter des beaux sentiments de Gontran…
28 mars 593, nouveau bouleversement : à l’âge de soixante-huit ans, Gontran meurt. Childebert hérite donc de ses États et a enfin toute liberté pour assouvir sa vengeance. À peine son oncle est-il enterré que Childebert lance ses armées contre le royaume de Neustrie. Mais c’était compter sans l’incroyable volonté de Frédégonde : tenant son fils âgé de neuf ans par la main, la reine enflamme le cœur de ses soldats et prend elle-même la tête de l’armée. Les Austrasiens sont défaits à Droisy, près de Soissons.
Frédégonde est victorieuse, mais elle sait bien que ce n’est que partie remise. Et la prochaine fois, pourra-t-elle résister à l’armée austrasienne ?
Dans le doute, elle décide d’agir… selon les bonnes vieilles méthodes : en 596 -Frédégonde était infiniment patiente- Childebert succombe à un empoisonnement !
Childebert éliminé, Frédégonde aurait enfin pu s’attaquer en toute impunité à sa vieille ennemie, la reine Brunehaut. Poutant, elle n’en fera rien. Peut-être juge-t-elle que les leudes austrasiens, qui secouent fortement le joug de la reine mère, se chargeront de la besogne. Peut-être préfèrerait-elle voir sa déchéance. Peut-être… mais elle n’en aura pas l’occasion. La reine sanguinaire, la meurtrière de Galswinthe, de Sigebert, de Mérovée, d’Audovère, de Clovis, de Prétextat, de Childebert et de bien d’autres encore, meurt en 597… dans son lit. 

Des Mérovingiens aux Carolingiens.

Des Mérovingiennes aux Carolingiennes : histoires d'alliances et de puissance
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Ecrit par Alix Ducret   
05-05-2010
Bague mérovingienne, attribuée à la reine Arégonde.
Bague mérovingienne, attribuée à la reine Arégonde.
Le rôle des femmes et la délimitation de leur sphère d’influence vont lentement évoluer au cours du haut Moyen Âge, c’est-à-dire du Ve au XIe siècle. Et le jeu des mariages ou l’apparition de certains titres permettent d’interpréter cette évolution.
Longtemps les historiens, et avec eux le commun, ont gardé l’image d’un haut Moyen Âge sanglant -l’épisode de Frédégonde et de Brunehaut en témoigne-, encore totalement barbare et ne laissant aucune place aux femmes. Certes, les rois ou la noblesse vivaient encore selon les règles des anciennes tribus germaines, mais c’est l’idée même d’une société où la femme ne tiendrait aucun rôle qui pourrait paraître rétrograde. Aussi, de plus en plus d’historiens se penchent sur le sujet, à savoir la place des femmes à l’époque mérovingienne et carolingienne : une recherche qui bouleverse les idées reçues.
An 476 : l’Empire romain d’Occident est désormais entièrement aux mains des barbares venus de Germanie. Les  Burgondes, Wisigoths ou Francs qui déferlent sur la Gaule sont bien des barbares… tels que les voyaient les auteurs gallo-romains du Ve siècle ; mais plus que de brûler et d’occire à tour de bras, ils ont introduit un autre système de pensée en Gaule, une société et une hiérarchisation différentes.
Les premiers témoignages que nous ayons sur les tribus germaines sont à mettre au crédit d’auteurs tels que César ou Tacite, au Ier siècle, qui ont observé un communautarisme très fort. En effet, les décisions, y compris celles concernant une expédition guerrière, étaient prises par un conseil regroupant toutes les familles, parmi lesquelles se trouvaient des femmes. À l’origine, il semblerait même que la succession se faisait par les femmes et ce n’est qu’après que ces tribus soient entrées en contact avec l’Empire romain -notamment sur le limes- et lorsque la guerre se révélera être leur principale ressource que la primauté masculine émergera. Mais cela n’empêchera pas les femmes d’avoir encore un certain rôle politique. En effet, lorsqu’un chef de tribu mourait en laissant un enfant pour héritier, c’est sa mère qui assurait la continuité du pouvoir jusqu’à ce que son fils soit en âge de diriger les guerriers. Ainsi, lorsque le roi des Ostrogoths, Théodoric le Grand meurt en 526, son petit-fils, Athalaric, n’a que dix ans. C’est donc Amalasonte, la mère du jeune prince, qui assure la tutelle de l’enfant. Par contre, quand, après la mort prématurée d’Athalaric, en 534, Amalasonte tente de conserver le pouvoir, les guerriers n’ont aucun scrupule à l’évincer. Il est donc clair que les femmes n’ont alors de pouvoir officiel qu’avec « l’excuse » de la régence.
Brunehaut : une politique visionnaire
De la même façon, la célèbre reine Brunehaut gouvernera l’Austrasie durant la minorité de son fils Childebert II puis, après l’empoisonnement de ce dernier, durant celle de ses petits-fils Théodebert II et Thierry II. Mais plus qu’une régente, Brunehaut va se révéler une véritable visionnaire politique. En effet, toute son action auprès de Thierry II -sur lequel elle a tant d’influence que l’on pourrait parler du règne de Brunehaut plutôt que de celui de son petit-fils- tendra à affirmer l’autorité royale sur l’ensemble du monde franc. Une conception unitaire et, il faut bien l’avouer, autoritaire du pouvoir qui s’opposera aux ambitions de l’aristocratie franque ; une conception sans doute trop avancée en ces temps d’anarchie…
Si Brunehaut a échoué en tentant de gouverner -presque- directement, il est un autre aspect du pouvoir que les Mérovingiennes ne négligeront pas, notamment Frédégonde et Brunehaut -encore. En effet, l’influence qu’elles exerceront sur leurs maris respectifs va engendrer une des périodes les plus sanglantes de l’histoire de France.
Tout commence lorsque Sigebert, petit-fils de Clovis, épouse une jeune et belle princesse wisigothe, Brunehaut -dont on a parlé plus haut. Chilpéric, cadet de Sigebert et roi de Neustrie, en conçoit une si grande jalousie qu’il décide simplement de faire de même : il répudie sa première femme, écarte sa concubine -une certaine Frédégonde- et épouse Galswinthe, la propre sœur de Brunehaut. Mais Chilpéric aimait nettement plus les « grands trésors », selon Grégoire de Tours, que lui avait apporté ce mariage, que la mariée elle-même. Peu scrupuleux et peut-être influencé par sa maîtresse, Chilpéric fait assassiner la malheureuse Galswinthe, ce qui lui permet de garder Frédégonde, qu’il épouse peu après… ainsi que les biens que sa femme avait apportés en dot.
Mais c’était compter sans l’influence de Brunehaut sur son mari qui, poussé à la vengeance par la jeune femme, lance ses troupes contre Chilpéric. Vont s’ensuivre plus de trente ans de rivalité, ponctués de meurtres, d’empoisonnements et de guerres entre les deux reines sanglantes, Brunehaut et Frédégonde.
Le jeu des alliances
Comme a pu le suggérer l’épisode de Brunehaut et de Frédégonde, l’assise du pouvoir par voix de mariage n’est pas une évidence à la fin du VIe siècle. Pourtant, c’est par ce système que les tout premiers mérovingiens vont construire leur pouvoir.
En effet, au début de l’époque mérovingienne, on constate que les relations d’alliance se définissent, selon l’historienne Régine Le Jan, « sur un système d’échanges complexes alliant pratiques exogamiques (c’est-à-dire mariages hors de la tribu, du clan) et renouvellement d’alliance ». Les familles royales s’alliaient par le biais du mariage afin d’assurer un équilibre entre les peuples. Ainsi, les rois mérovingiens du début du VIe siècle, épousent-ils des princesses thuringiennes, burgondes, wisigothes ou lombardes et donnent leurs propres filles ou sœurs à des souverains ostrogoths, wisigoths, lombards.
Dès la seconde moitié du VIe siècle, considérant sans doute que leur autorité est solidement assise, les souverains mérovingiens se sentent autorisés à épouser des femmes de l’aristocratie et même des « non-libres » comme Austregilde, Frédégonde, Nanthilde ou Bathilde, brisant ainsi les règles de l’alliance dont ils sont censés être les garants. Des quatre fils de Clotaire, par exemple, seul Sigebert optera pour le vieux système d’alliance exogamique en épousant Brunehaut, fille du roi des Wisigoths Athanagild. Caribert et Chilpéric, quant à eux, épouseront -en premières noces- des femmes de l’aristocratie franque (Ingoberge et Audovère) et Gontran passera de concubine en concubine.
Mais si les rois eux-mêmes ne semblaient pas faire la distinction entre les épouses issues de maisons royales et les autres, il n’en est pas de même des chroniqueurs. Ainsi, il apparaît que Brunehaut est désignée, dès le début, sous le titre de reine -à la rigueur de princesse-, alors que les épouses non-libres des Mérovingiens ne l’obtiennent qu’après avoir donné une descendance. Frédégonde, par exemple, est désignée sous le terme d’épouse de Chilpéric et n’obtient le titre de reine qu’après la naissance de son premier fils.
On voit clairement ici l’importance de la maternité dans le statut de la femme, situation que l’on retrouve dans la société germanique originelle.
En effet, si, selon la loi germanique, l’homme a une prééminence certaine sur la femme dans le mariage -prééminence d’abord dans le domaine sexuel puisque la polygamie est autorisée pour les hommes et que l’adultère féminin est prohibé, essentiellement pour des raisons simples de légitimité- le statut de la femme apparaît très clairement dans les cas d’offenses à payer. Chez les Germains, comme chez les Scandinaves d’ailleurs, existait un système permettant de payer pour racheter une offense, une blessure, un meurtre même, système que l’on pourrait comparer aux « dommages et intérêts » modernes. Et il apparaît que serrer le bras d’une femme, ce qui constitue chez les Germains une grave offense, donne lieu à un dédommagement plus important que si l’on a blessé gravement un homme. L’amende pour le meurtre d’une femme est égale à celle à payer pour l’assassinat d’un homme (200 sous). Mieux encore : si la femme tuée était en âge d’être mère, le dédommagement s’élève à 600 sous et à 800 si elle était enceinte !
La légitimation dynastique
La femme a donc un grand rôle comme mère ou comme future mère, mais, en tant que femme, elle sera longtemps assujettie à un homme : d’abord son père puis son mari et tous les hommes de la famille si son époux meurt. Mais dans une société où la force guerrière joue un rôle si essentiel, la position des hommes et des femmes ne peut qu’être inégale. Et si même les plus énergiques des femmes du haut Moyen Âge se sont, un jour ou l’autre, inclinées devant la force d’un homme, cela n’a cependant pas empêché les femmes d’exercer un certain pouvoir, comme on l’a vu pour les Mérovingiennes.
À l’époque carolingienne, alors que la royauté a repris le bon vieux système des alliances « utiles », les femmes ont surtout, selon Régine Le Jan, « légitimé le pouvoir exercé par les hommes de leur famille ». Le mariage entre personnes de même condition contribuait nécessairement à légitimer ce pouvoir, « la mère transmettant à ses enfants la noblesse de sa propre famille » et bien sûr les droits l’accompagnant.
Dans les familles royales de l’époque carolingienne, le rôle -et donc le pouvoir- de la femme va plus loin, est ancré plus profondément. La raison tient tout d’abord au fait que les rois carolingiens étaient sacrés et que cette légitimité de personne sacrée venait automatiquement de leur filiation. En effet, un roi est roi non seulement parce qu’il a été couronné, non seulement parce qu’il a reçu l’onction, mais surtout parce qu’il est le fils du roi précédent ! Un fait que l’on traduira plus tard par la formule :
-Le roi est mort, vive le roi !
Voilà qui explique l’importance des origines paternelle… et maternelle.
Parallèlement à cette évolution dans les mentalités, il apparaît que la reine est désormais étroitement associée au trône et à cet aspect sacré du roi. Deux changements, la légitimation dynastique et l’association de la reine, qui apparaissent pour la première fois avec l’avènement de Pépin le Bref : en effet, le Pippinide sera béni et oint en même temps que son épouse, la reine Berthe au grands pieds. Ainsi, dès le début et bien qu’issue de l’aristocratie, la dynastie pippinide assoie doublement son pouvoir, au point de le rendre inaliénable.
Bien que de haute ascendance, bien que sacrés, les premiers carolingiens vont mettre en place une politique d’alliance qui doit favoriser l’assise de leur pouvoir à l’intérieur de leurs frontières. C’est pourquoi ils développent tout d’abord une politique d’alliance avec l’aristocratie de leur royaume (hypogamie). Parallèlement, ils restreignent les mariages de leurs propres filles, afin de ne pas morceler le domaine royal. Cette double politique va admirablement servir les premiers souverains carolingiens qui constituent ainsi un solide réseau familial, permettant d’assurer le trône, par la fidélité des grands du royaume, en même temps que la paix sociale. Ce n’est qu’à la fin de la dynastie carolingienne que l’on voit apparaître des reines issues de famille royales voisines. Mais, à ce moment, le trône paraît solide et, surtout, les Carolingiens règnent sur toute l’Europe : toute alliance n’est donc plus qu’une affaire de famille…

Les Mérovingiens.

Souverains français - Mérovingiens - Clotaire 1er -

Publié le 26/11/2009 à 11:11 par acoeuretacris Tags : Souverain merovingien
Souverains français - Mérovingiens - Clotaire 1er -
Clotaire 1er dit le Vieux(497-561)


Roi d'Austrasie de 555 à 561, roi de Neustrie de 511 à 561, roi d'Orléans de 524 à 561, roi de Paris et de Bourgogne de 558 à 561 et Co-roi de Burgondie avec son frère Childebert de 534 à 558


Il était le 4ème fils deCloviset deClotilde. À la mort de son père, en 511, il partagea le royaume des Francs, le Regnum Francorum, avec ses 3 frères, Thierry 1er, Clodomir 1er et Childebert 1er. Alors que Thierry, l'aîné, est largement avantagé, Clotaire partagea la moitié du royaume de Clovisavec ses 2 autres frères. C'est la Neustrie qui lui échoit. En 517, il épousa
Ingonde. En 523-524, à l'instigation de Clotilde, Clotaire et ses 3 frères se joignirent à l’expédition contre les Burgondes.

  À la mort de Clodomir, le 25 juin 524 à la bataille de Vézeronce, il épousa sa veuve,
Gondioque, mais cela ne suffit pas pour obtenir le territoire de son défunt frère. La loi salique imposant le partage du royaume entre les fils de Clodomir. Pour éviter cela, il s'allia à Childebert pour organiser l'assassinat des 3 jeunes héritiers en 532. 2 furent tués, et le dernier, Clodoald, d'abord caché par des partisans fidèles, renonça à sa part, et choisit la vie monastique. Clotaire et Childebert pouvaient alors librement se partager le territoire de leur frère.

  En 538, il épousaRadegonde. Mais celle-ci préféra se retirer dans un couvent, plutôt que de vivre à ses côtés. Elle fonda l'abbaye Sainte-Croix, premier monastère de femmes d'Europe, à Poitiers. Elle fut ensuite canonisée sainte
Radegonde.

  Ingonde lui ayant demandé de trouver un mari à sa sœur
Arnegonde, digne de sa haute lignée, le roi ne trouva finalement pas meilleur prétendant que lui-même, et décida aussi d'épouser la seconde des sœurs. Il les força à vivre ensemble jusqu'au décès d'Ingondevers 546.

  Il épousa encore Chunsina, puis Vulderade en 555, veuve de
Thedebald, roi d'Austrasie. Les décès de Theobald et de Childebert, mort sans descendance en 558, permirent ainsi à Clotaire de réunifier à nouveau le Regnum Francorum de son père
Clovis.

  Son fils Chramne lui causa bien des problèmes, poussé par son oncle Childebert, il complota 2 fois de suite contre son père. Clotaire lui accorda une première fois son pardon, mais Chramne récidiva en 560. Cette fois, Clotaire fut bien décidé à en finir. Chramne se réfugia en Bretagne, auprès du comte
Conomor, dont les troupes ne pouvaient résister à l'armée de Clotaire. Celui-ci fut vaincu et tué, Chramne fut capturé, et étranglé. Sur ordre de Clotaire, sa dépouille fut enfermée, avec toute sa famille, dans une cabane à laquelle on mit le feu.

  Son règne fut marqué par plusieurs campagnes militaires, la guerre contre les Burgondes de 523 à 526, la campagne de Thuringe en 530, l'invasion de la Burgondie en 534 en compagnie de son frère Childebert, la tentative échouée d'invasion de l'Hispanie wisigothique en 542.
À la fin de son règne, le royaume franc était à son apogée, couvrant toute la Gaule à l'exception de la Septimanie et une partie de l'Allemagne actuelle. Il meurt en 561 à Compiègne, à l'âge de 64 ans, laissant son royaume à ses 4 fils, qui se partagèrent l'héritage par tirage au sort

Les paysans au Moyen Age.

Les paysans au Moyen Âge

Les mots suivis d'un * ont leur définition dans le glossaire .

Les débuts

Pour développer l'agriculture, il faut tout d'abord préparer le terrain autant que les hommes :
- défricher (par le feu, la hache) les forêts
- emblaver*
- se sédentariser pour surveiller et protéger la croissance des cultures et assurer la récolte.
Les hameaux se bâtissent et s'agrandissent au centre des terrains gagnés sur la forêt.
Entre 1050 et 1150 les seigneurs poussent les paysans à défricher pour augmenter la production agricole. Cette période s'achève au XIII° siècle. Les villages qui naissent ont pour nom : Neubourg (le nouveau bourg), Les Essarts (du verbe essarter* ). Dans le sud de la France on appelle bastides ces nouveaux habitats créés au XIII°s ou après la guerre de Cent Ans.
Après le défrichage, les troncs d'arbres abattus ne servent pas à construire le nouveau village. Le bois vaut cher, le seigneur le vendra.
Les défriches trop nombreuses et incontrôlées causent des catastrophes : glissements de terrain, inondations en chaîne, maisons emportées, bourgs et villages submergés.
Le système de défrichement de l'époque se fait d'abord et très souvent par le feu, qui laisse un sol très sensible à l'érosion.
Le plus souvent, beaucoup de forêts - et pas toujours celles qui sont susceptibles d'être défrichées - servent toute l'année à faire pâturer les troupeaux : le sol, dépouillé de toute petite végétation (celle qui retient l'eau en surface), part à chaque grosse pluie.
Les pouvoirs royaux ou régionaux furent contraints d'établir des lois et des règlements partout où cela se révéla nécessaire pour limiter les dégâts.

Les outils

L'araire : charrue de bois dépourvue de roues. Elle creuse des sillons sans retourner la terre. Elle est efficace sur les sols légers mais insuffisante pour les terres humides, argileuses du nord.
Plus tardif : la charrue.
Pour que le grain germe bien, il faut apporter de l'oxygène à l'intérieur du sol et seule la charrue à versoir aère la terre en profondeur. C'est un outil coûteux qui contient du fer et nécessite la force un animal de trait. La charrue comporte trois outils :
- le coutre (couteau qui coupe la terre verticalement)
- le soc (coupe horizontalement en profondeur)
- le versoir (retourne la terre coupée sur le côté).
La herse
La houe
La faucille

Les techniques agricoles

Les rendements sont généralement de 1 pour 2. On calcule que en général 1 à 1,5 ha étaient nécessaires pour subvenir aux principaux besoins d'une personne. Dans les meilleures périodes (fin du Moyen Age plutôt) le rendement passa à 1 pour 5.
Assolement triennal :
1° année : céréales d'hivers
2° année : céréales de printemps
3° année : jachère
Cheptel peu développé => peu de fumier
Travaux en fonction des saisons
Hiver
La terre gelée est au repos et les paysans se font bûcherons ou artisans.
Le bois sert à tout : à la construction, à la cuisine et au chauffage, à fabriquer des charrettes et des outils (râteaux, herses, fourches).
Sont aussi confectionnés des paniers, est tanné le cuir pour les chaussures et les harnais. Si le seigneur est un abbé, il demandera des peaux de moutons pour ses parchemins.
Printemps
[le printemps est aussi la période des disettes lorsque la moisson précédente a été maigre et que la nouvelle récolte tarde à venir.]
C'est le moment des labours (dès que la terre est dégelée) puis des semailles.
La fin de l'hiver est le moment de tailler la vigne. Elle est cultivée dans le nord de la France, en Angleterre et aux Pays Bas jusqu'au XIV° siècle.
Entre avril et juin a lieu la tonte des moutons.
Eté
C'est le foin que l'on fauche en premier, puis vient la moisson.
Les épis sont coupés à la faucille. Les tiges sont laissées sur place pour servir de pâture. Les chaumes seront brûlés afin de fertiliser la terre.La récolte des épis est déposée sur l'aire puis battue au fléau ou piétinée par les mulets. Pendant les mois suivants, le grain sera moulu en fonction des besoins.
Automne
En octobre la terre est travaillée à nouveau pour recevoir les semailles d'hiver qui germeront au printemps suivant.
C'est aussi le temps de la vendange.
A l'automne la forêt donne ses fruits : miel, glands pour engraisser les porcs, noisettes, châtaignes (dont on fait une farine qui remplace le blé pour les plus pauvres).
Dans les clairières on fabrique le charbon de bois.
Polycultures de céréales : seigle, blé, avoine, orge, millets.
Les céréales sont complétées dans l'alimentation par quelques légumineuses : fèves, pois, lentilles.
Dans les forêts on récolte pour le bétail autant que pour les hommes : glands, faînes, merises, pommes sauvages, nèfles, fruits de l'aubépine, cynorhodons, noisettes, prunelles, framboises, mures, fraises.
Le milleperthuis ou la marjolaine peuvent servir de condiment ou de remèdes.
Elevage : le porc est l'animal prédominant car il donne plus de viande par rapport à son poids. Tout se mange et sa chair grasse se conserve bien.
Des croisades, certains seigneurs ramènent les principes de l'irrigation. Ce qui fonctionne sous un soleil impitoyable et pour une terre aride fera des merveilles dans un climat plus tempéré.
La majorité de la main-d'oeuvre est louée. Manouvriers, gens de peine, sont embauchés suivant les travaux et les saisons. Leur recrutement se fait dans les régions proches des domaines. On trouve : laboureurs, faucheurs, moissonneurs, bergers, bûcherons.
Le fumier est l'un des seuls fertilisants que l'on connaisse à cette époque. Il est si précieux que l'abbé de Saint Denis demande à ses paysans - entre autres redevances - des pots de fientes de pigeons.
On ne peut pas augmenter les troupeaux pour avoir plus de fumier. Nourrir du bétail nécessite des pâturages et toute la surface de la terre sert aux céréales destinées aux hommes. De plus, boeufs et moutons mangent du foin pendant l'hiver . Mais ce fourrage est une denrée de luxe réservée aux chevaux des seigneurs.
Le cheval est un animal noble. il vaut trop cher en général pour tirer la charrue. Jusqu'à la fin du Moyen Age ce sont les boeufs que l'on attelle. Dans les régions pauvres c'est l'homme qui pousse l'araire.

Corvées, taxes et impots

Le seigneur fait payer cher sa protection, d'abord sous forme de corvées :
- curer les fossés,
- empierrer les chemins
- rentrer du bois,
- rentrer du fourrage...
Puis à mesure que l'argent circule mieux, les corvées sont remplacées par les redevances* :
- la taille (sert à payer la protection du seigneur). Elle apparaît après 1050. C'est un impôt direct. A partir du XIV° siècle, la taille devient un impôt royal.
- Les aides (taxes sur le transport des marchandises)
- le cens et le champart (forment le loyer de la terre). Pour avoir le droit de s'installer et de vivre sur la terre d'un seigneur, le paysan paie deux sortes de redevances. Le cens qui est fixe et le champart, calculé en fonction de la récolte ; plus celle-ci est bonne, plus le paysan paie cher.
Les banalités : Ces taxes liées au droit de ban que détient le seigneur étaient si fréquentes qu'elles ont donné le mot "banal" dans notre langage d'aujourd'hui.
Ces banalités coûtent chers aux paysans qui doivent payer un droit pour utiliser le moulin, le pressoir et le four à pain que le seigneur a fait construire et que lui seul a les moyens d'entretenir.
Les serfs doivent payer des impôts particuliers :
- la mainmorte au moment d'un héritage
- le formariage pour se marier à l'extérieur de la seigneurie.

La vie quotidienne

La moitié des enfants meurent en bas âge et rares sont les vieillards de plus de 40 ans.
Le pain est la base de l'alimentation.

Différents paysans

Au XII° siècle la plupart des paysans travaillent sur les terres d'un seigneur et sont locataires de parcelles (tenures* ). Ces paysans sont des hommes libres. Leurs parents où leurs aïeux se sont engagés par un bail, mais il dure parfois plusieurs vies. En théorie ils peuvent partir travailler la terre d'un autre seigneur. En réalité, ils restent par besoin de sécurité.
Seuls les serfs sont attachés à une terre, un maître. Mais ils ne sont pas non plus des esclaves. Ils peuvent vivre en famille et posséder quelques biens. Les serfs exploitent une partie du domaine que le seigneur garde pour lui : la réserve.
Les serfs doivent payer des impôts particuliers comme la mainmorte au moment d'un héritage et le formariage pour se marier à l'extérieur de la seigneurie.
A partir du XII° siècle de nombreux seigneurs affranchissent leurs serfs, préférant employer des salariés ou louer leur réserve à des fermiers (paysans qui paient un fermage, une sorte de loyer en argent, pouvant valoir un tiers ou même la moitié des récoltes).
Au cours des siècles, certains fermiers réussissent à s'enrichir. A la fin du Moyen Age ils forment la classe des laboureurs, qui possèdent une paire de boeufs ou un cheval et un attelage. Rien à voir avec les pauvres manouvriers qui n'ont que leurs bras.

Le seigneur et ses paysans

Dans les guerres, les paysans sont les premières victimes. Les adversaires veulent faire table rase de tout ce qui appartient à l'ennemi : récoltes et manants compris. Puis, il y a le pillage.
Le seigneur qui, seulement occupé par les plaisirs de la chasse, piétine et détruit sans scrupules les récoltes des paysans a existé. Ce n'est pas une exagération des livres d'histoire. Des chroniqueurs de l'époque rapportent ces faits. Louis XI même condamna sévèrement cette pratique.
Mais un tel comportement n'est pas systématique. Beaucoup de petits seigneurs, souvent ruinés eux aussi par la guerre, tirent la plus grande de leurs revenus des terres qu'ils possèdent. Elles sont exploitées par des serfs ou des manouvriers, ou cédées en fermage sous forme de tenure*. Mais toutes sans exception, doivent en fin d'année, par le jeu des redevances diverses, en nature ou en argent, leur rapporter de quoi vivre.
Le seigneur a souvent mieux à faire que de s'occuper de ses domaines. Il confie cette tâche à un intendant qui surveille les travaux agricoles et lève les impôts.
Mais si le seigneur est le plus fort parce qu'il possède les armes et le donjon, il ne peut pas faire n'importe quoi. Il est tenu par la coutume. Elle définit les droits et les devoirs de chacun. Transmise oralement par les anciens, elle est écrite à partir du XII° siècle.

Les Mégalithes.

Jean Markale et les megalithes

 

Avertissement
Cette interview de notre ami Jean Markale par Gérard Moreau de Waldan dont nous avons fait état de nombreuses fois dans nos travaux, date de 1989. Cependant, malgré le temps passé, nous la pensons toujours d’actualité et semblant ne rien avoir perdu de sa saveur. C’est donc avec plaisir que nous l’entrons sur nos colonnes comme un témoignage de la ‘civilisation des mégalithes’, à l’attention de nos lecteurs.
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Lors d'un de ses passages chez nous, nous avons posé quelques questions à M. Jean Markale au sujet des monuments Mégalithiques. Voici donc le résultat de cet entretien :
G.M.W. : Que pensez-vous de la civilisation des mégalithes ?
J.M. : Qui étaient ces constructeurs de mégalithes ? Il est difficile de répondre à cette question. Leur race est indéterminée. Leur langue est inconnue. Les fouilles archéologiques ont permis de constater que, la plupart du temps, c'étaient des semi-nomades, vivant de chasse, de cueillette, de pêche, et pratiquant une agriculture rudimentaire. Nous sommes aux environs de l'an 3000 avant notre ère.
G.M.W. : Peut-on affirmer que ces monuments mégalithiques se trouvent principalement en Bretagne ?
J.M. : Ces monuments, quoique l'imagerie d'Epinal largement diffusée ait fait de la Bretagne leur terre d'élection, ne sont absolument pas caractéristiques de la péninsule armoricaine. On en trouve partout en Europe ; on en trouve en Afrique et même en Corée. En Europe occidentale même, c'est le département de l'Aveyron, en pleine Occitanie, qui contient le plus de dolmens, et l'Irlande en a conservé un nombre impressionnant. Cependant, si l'on considère les fameux alignements de Carnac et si l'on tient compte des nombreux monuments qui ont été détruits au cours des âges, c'est quand même la Bretagne, et particulièrement la région du Morbihan, qui occupe la première place quant à ces stèles qu'on appelle des menhirs.
G.M.W. : On a souvent prétendu que les constructeurs de mégalithes avaient de très grandes connaissances astronomiques, qu'en pensez-vous ?
J.M. : Sans aucun doute, des considérations astronomiques ont présidé à l'érection de ces monuments titanesques, mais cela ne nous renseigne guère sur le but d'un tel déploiement. Religion de type céleste, avec notions astronomiques et par conséquent astrologiques ? Nous ne pouvons répondre affirmativement sans ajouter aucune suite à cette constatation.
G.M.W. : Pour certains, il est courant de rapprocher les monuments mégalithiques des pyramides d'Egypte, qu'en pensez-vous ?
J.M. : Il est certain qu'il n'y a aucun rapport entre Karnak et Carnac.
Quant à l'analogie entre les dolmens, les allées couvertes, et les pyramides d'Egypte, elle a le plus de chances de correspondre à une réalité objective. En effet, tout semble montrer un même souci de placer le défunt dans un décor qui pût rappeler les circonstances de sa vie, de l'entourer de ses objets familiers, même en réduction sous forme votive, et de lui assurer une demeure pour l'éternité.
G.M.W. : Peut-on parler de religion mégalithique ?
J.M. : Nous ne savons rien des croyances des peuples mégalithiques, sinon qu'ils adoraient une divinité féminine dispensatrice de vie et de mort, et dont la représentation est fréquente sur les supports intérieurs des dolmens. Mais la religion de ces peuples reste une énigme pour nous.
G. M.W. : Mais peut-on parler de civilisation, alors ?
J.M. : On peut dire que les peuples des mégalithes possédaient une civilisation.
Leur art nous est connu. Les supports de certains monuments comportent en effet des gravures fort mystérieuses, qui paraissent davantage relever d'une écriture hiéroglyphe que d'un art purement décoratif. En fait, si l'on voulait caractériser l'art dolménique, il faudrait parler d'une époque de transition entre la figuration et la non-figuration, une sorte d'éclatement de l'univers réel au profit d'une sacralisation des formes. Ce sont généralement des lignes évoquant les flots de la mer, la forme des barques ou des chars, les cornes d'un animal ou les phases de la lune, toutes ces images se présentant comme une sorte de surimpression où l'objet n'est plus seulement lui-même, mais aussi d'autres choses. Les figurations humaines sont très rares, encore sont-elles schématiques, comme si les peuples des mégalithes avaient craint de fixer dans la pierre l'image de l'être humain. A Gavrinis, la plupart des gravures émanent de la chevelure ou la provoquent, comme elles provoquent les mouvements de la tempête sur la mer. Un second élément caractéristique, le collier, sert de réplique à la chevelure et prolonge encore plus avant le cadre naturel de l'ouvrage. Le collier a été, lui aussi, un insigne de puissance, et les Celtes, héritiers directs de cette civilisation mégalithique, en développeront largement l'usage et le sens symbolique, surtout dans leurs célèbres torques. Un troisième élément semble avoir été à l'honneur à Gavrinis : la hache non emmanchée, symbole de force, devenue image même de la divinité. Il voisine souvent avec des signes ‘serpentiformes’. La pierre n'est plus une pierre : elle est devenue, par abandon total de la matière, le témoignage le plus éblouissant du triomphe de l'esprit créateur sur la masse inerte, le triomphe de la vie sur la mort. Et tout cela défie les siècles. Dans l'ombre des tertres, l'image de la déesse inconnue contemple encore les quelques fidèles qui se risquent dans ces sanctuaires pour tenter d'apercevoir une portion de l'infini. Malheureusement, de cette vision transcendantale de l'univers due à des peuples dont l'histoire a oublié le nom, nous ne possédons plus que les négatifs, gravés en creux dans la pierre d'un monument enfoui depuis des millénaires en un îlot battu par les vents.

G.M.W. : On a souvent fait le rapprochement entre le druidisme et la civilisation des mégalithes, qu'en pensez-vous?
J.M. : La tradition populaire a relié druidisme et mégalithes ; c'est peut-être parce qu'il y avait entre eux un certain rapport, même vague ou secondaire. Après tout, les textes mythologiques irlandais font des tertres mégalithiques les demeures des anciens dieux : cette localisation n'est peut-être pas due au hasard et, assurément, elle pose un problème qu'on ne peut esquiver en se retranchant définitivement derrière des certitudes archéologiques. Après tout, certains sanctuaires romains sont devenus des églises chrétiennes, et la plupart des chapelles chrétiennes se trouvent à l'emplacement de lieux de cultes plus anciens, aussi bien gréco-romains que celtiques ou préhistoriques. Il y a eu aussi réemploi, réutilisation de certains monuments, et les exemples ne manquent pas sur ce sujet. De plus, les religions ne meurent pas complètement : de l'ancienne, il reste toujours certains éléments, de croyances ou de rituels, des habitudes acquises en quelque sorte, dans la nouvelle qui s'installe. Il n'y aurait donc rien d'étonnant à ce que le druidisme ait recueilli un certain héritage des populations que les Celtes ont trouvées, installées dans les territoires qu'ils ont occupés et avec lesquelles ils ont, bon gré, mal gré, formé une communauté nouvelle. Ce qui resterait à déterminer, dans ce cas, c'est la part exacte de cet héritage. Et cela ne résoudrait aucunement le problème de l'origine du druidisme. Etait-ce une religion importée par les Celtes indo-européens, et d'où ceux-ci l'avaient-ils amenée avec eux ? Etait-ce au contraire une religion autochtone qui a été complètement réformée, repensée et structurée par les conquérants celtes ? La structure du druidisme paraît très nettement indo-européenne. Mais le reste, les croyances, les rituels, certaines façons de penser et de raisonner sur l'Au-Delà ?
G.M.W. : Et bien, Monsieur Jean Markale, nous vous remercions pour cet entretien exclusif, sachant que vous n'aimez pas donner d’interviews ; mais ici ce n'est pas une véritable interview, ce n'est, tout au plus, qu'une conversation entre amis qui s'apprécient et se respectent, ce qui n'est pas si souvent le cas. Nous espérons que nous pourrons refaire cette expérience un jour prochain.
Gérard Moreau de Waldan
Pour nos amis lecteurs que ces différents sujets pourraient intéresser, nous leur conseillons cette petite bibliographie :
"Carnac et l'Enigme de l'Atlantide", aux éditions Pygmalion
"Histoire secrète de la Bretagne", Editions Albin Michel

La croix druidique.

La croix druidique… tradition atlante

 

Avertissement
Ce texte a été écrit par G. Moreau de Waldan, à l’époque où il était vice-président de ‘Vaisseau de Sable’. Une fois de plus, son savoir sur le celtisme et ses annexes nous permet, au-delà du temps, d’en savourer la teneur et l’information. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur l’auteur, poète et druide, Phileas Lebesgue car G. Moreau nous avait donné de nombreux documents concernant ce personnage aussi discret qu’oublié de tous. Nous compenserons donc cette ‘traversée du désert’ en rendant hommage ultérieurement.
Paul Le Cour et Phileas Lebesgue furent les co-fondateurs, le 24 juin 1926, avec Roussel-Despierres, de la première Société ‘Etudes Atlantéennes’, d’où sortira, en octobre 1927, la Revue ‘Atlantis’. Paul Le Cour associa à son oeuvre, dès le début, Phileas Lebesgue. Phileas Lebesgue était Grand Druide du Gorsed de Bretagne. Il sera, jusqu'à sa mort en 1958, Grand Druide de France. Voici ce qu'il écrivait en 1954, dans un numéro de la Revue ‘Atlantis’ : «Les assises de la civilisation occidentale de race blanche ont été posées par des variétés humaines chez lesquelles le sang Ibéro-Atlante, le sang Achoeo-Ligure et le sang Celto-Ayrien se sont amalgamés étroitement, avec prédominance très nette d'hyperboréisme. Impossible de rien comprendre, cependant, à cette évolution, si l'on oublie que les sources sont à l'Occident, en Atlantide.»
Mais d'où pouvait provenir la Tradition Druidique ?
Une tradition druidique antédiluvienne ? Dans le n° 27 d'Atlantis, intitulé ‘Rencontre avec le Druidisme éternel’, Phileas Lebesgue écrivait : «Cette doctrine, que l'on dit avoir influé sur celles des Druides jusqu 'à leur faire accepter la croyance en l'immortalité de l'âme, ne s'est-elle pas constituée sur le fond essentiel de la Révélation primitive, dont les Druides étaient eux-mêmes les dépositaires ?... L'enseignement des Druides, qui florissait déjà à l'époque ligurique, c'est-à-dire avant que le nom même des Celtes ne se fût répandu à travers l'Europe, n'a guère laissé de traces... » Phileas Lebesgue affirmait souvent : «Tout ce que j'ai pu apprendre du Grand Mystère n'est que d'intuition pure... » Nous savons que les druides connaissaient la mesure du temps, les radiations telluriques du sol et du ciel, l'atome comparé à des systèmes solaires, etc… La civilisation des Druides s'établissait à la fois sur leurs connaissances Cosmogoniques et sur leur Théogonie.
Cet ensemble de la Connaissance de la terre et du ciel, cette Cosmogonie secrète détermina une Théogonie révélant des aperçus profonds sur les origines de la vie, la croyance en la survivance de l'âme et en un Dieu Unique, des rapports entre la Divinité et le magnétisme solaire, terrestre, animal, végétal et minéral. Deux pentacles provenant de la Tradition primordiale sont parvenus jusqu'à nous grâce au Druidisme, à ne pas confondre avec le celtisme et le pseudo-néo-druidisme que nous voyons fleurir aujourd'hui. Ce sont le Zodiaque et la Croix Druidique dite du Dendrophore.
La Croix Druidique a ceci d'exceptionnel, c'est qu'elle contient dans son enseignement la totalité de ces connaissances. Nous savons que l'astrologie religieuse fait commencer le ‘Zodiaque’ au signe de la Vierge, soit environ quinze mille ans avant notre ère, et que, dans la Tradition Druidique, les Grands Initiés descendent de la déesse Dana et que toutes la mythologie est basée sur le peuple des Tuatha Dé Danann, les fils de la déesse Dana, dont le Grand Dieu n'est autre que Lug. Il est donc contemporain, ce Zodiaque, de l'homme de Cro-Magnon, de l'apogée de l’art pariétal, de l'apparition des premières ‘Vénus’ et du culte de la déesse Mère et de la sacralité de la femme. Nous savons que la civilisation Druidique, ou Ligure, n'est, au contraire de toutes les civilisations, tant orientales que moyennes orientales, ni patriarcale, ni matriarcale, mais duelle. Nous comprenons pourquoi les Grecs disaient avoir été instruits par les Druides, ce qui a pu faire écrire à Aristote que la ‘Philosophie’ avait commencé chez les Celtes (Keltoï), et que la Gaule avait été l'institutrice de la Grèce.
Les druides... chez Platon
La Croix du Dendrophore se retrouve dans Platon, au dialogue du ‘Critias’, et se rapporte, d'une façon irréfutable, à l'Atlantide. Les prémisses se font sentir dans le ‘Timée’. Ces ouvrages furent écrits au cinquième siècle avant notre ère. Ecoutons Critias, dans le ‘Timée’ : «Je vais redire cette vieille histoire, comme je l'ai entendu raconter par un homme qui n'était pas jeune. Car Critias était alors, à ce qu'il disait, près de ses quatre-vingt-dix ans... un des prêtres qui était très vieux, lui dit : «Ah! Solon, Solon, vous autres Grecs, vous êtes toujours des enfants... Il y a eu souvent et il y aura encore souvent des destructions d'hommes causées par le feu et par l'eau... tout d'abord vous ne vous souvenez que d'un seul déluge terrestre, alors qu'il y en a eu beaucoup auparavant...». Puis le prêtre de Sais donne la véritable classification sociale, que l'on retrouve dans le Druidisme Traditionnel et non folklorique. Nous savons que les druides, et non les Celtes, connaissaient, non pas trois classes sociales, mais cinq. Voici ce que dit ce prêtre : «C'est ainsi d'abord que la classe des prêtres est séparée des autres, de même celle des artisans, où chaque profession a son travail spécial, sans se mêler à une autre, et celle des bergers, des chasseurs, des laboureurs. Pour la classe des guerriers, tu as sans doute remarqué qu'elle est chez nous également séparée de toutes les autres ; car la loi leur interdit de s'occuper d'aucune autre chose que de la guerre... «Les quatre éléments de la Croix Druidique sont : l'air, l'eau, le feu et la terre, ils représentent les quatre classes que nous venons de voir : prêtres, artisans, paysans et guerriers. Chose que l'on oublie souvent, c'est que, dans le Druidisme il y a un cinquième élément : l'éther. Dans notre classification, l'éther sera représenté par la classe royale.»
Puis, dans le ‘Critias’, il nous donne la description de la cité principale du peuple et de l'île Atlante : «Du côté de la mer, s'étendait, par le milieu de l'île entière, une plaine. Vers le centre de cette plaine on voyait une montagne. Poséidon fortifia la colline en en découpant le pourtour par des enceintes faites alternativement de mer et de terre, les plus grandes enveloppaient les plus petites. Il en traça deux de terre et trois de mer et les arrondit en partant du milieu de l'île... Or cette plaine avait été aménagée comme je vais dire. Elle avait la forme d'un quadrilatère... De la partie haute de la ville partaient des tranchées qui coupaient la plaine en ligne droite et se déchargeaient dans le fossé près de la mer...» Dans le ‘Ménon’, Platon nous donne quelques indications sur les Druides et le Druidisme, en laissant parler Socrate : «Ce sont des prêtres et des prêtresses qui ont eu à coeur de pouvoir rendre compte des objets concernant leur ministère. Ce qu'ils disent, le voici : ils disent que l'âme de l'homme est immortelle, et que tantôt elle s'échappe, ce qu'on appelle mourir, et tantôt reparaît, mais qu'elle ne périt jamais, et que, pour cette raison, il faut mener la vie la plus sainte possible... Donc, puisque l'âme est immortelle et qu'elle a vécu plusieurs vies, et qu'elle a vu tout ce qui se passe ici et dans l'Hadès, il n'est rien qu'elle n'ait appris».
Dans le ‘Cratyle’, il nous donne d'autres indications, toujours par la bouche de Socrate : «Je crois que les premiers habitants de la Grèce ne reconnaissaient d'autres dieux que ceux qui sont adorés aujourd'hui chez un grand nombre de barbares, le soleil, la lune, la terre, les astres et le ciel.» Au sujet des ‘Démons’, nos habitants des ‘Sidhs’, voici son explication: «que peut bien signifier le nom de démons ? Te rappelles-tu qui sont ces démons, au dire d'Hésiode ? Ne te rappelles-tu pas non plus qu'il dit que la première race des hommes fut une race d'or ? Or il dit d'elle : «Depuis que le sort a recouvert cette race, on les appelle Démons, habitants sacrés de la Terre, bons, secourables, gardiens des mortels.» Pour moi, je suis persuadé qu'en parlant de la race d'or, il n'entend pas qu'elle est formée d'or, mais qu'elle est bonne et belle : et la preuve pour moi, c'est qu'il nous appelle race de fer.
Voici donc, selon moi, ce qu'il entend essentiellement par les démons : c'est parce qu'ils étaient sages et savants (savants = doèmonès) qu'il les a nommés démons, et ce mot même se rencontre dans notre ancienne langue. Je m'imagine que les Grecs, et surtout ceux qui habitent les contrées soumises aux barbares, ont emprunté aux barbares un grand nombre de noms.»
Dans le ‘Critias’, Platon nous fait la description des hommes de l'Atlantide : «Ils étaient renommés dans toute l'Europe et toute l'Asie pour la beauté de leurs corps et les vertus de toute sorte qui ornaient leurs âmes et ils étaient les plus illustres de tous les hommes d'alors.»
Des similitudes indéniables
Dans sa forme de calendrier, la Croix Druidique nous donne la fête de Samaïn, le 1er novembre. Lors de cette fête, les vivants et les morts pouvaient communiquer puisque les ‘Sidhs’ s'ouvraient. Les ‘Sidhs’ sont des tumulis et des monuments mégalithiques habités par les gens de ‘l'Autre Monde’. Ces gens de ‘l'Autre Monde’ sont des divinités. Les ‘Sidhs’ sont également localisés au-delà de l'Océan Atlantique ; aujourd'hui, dans les légendes, ce sont les ‘tertres aux fées’. Ce mot ‘Sidhs’ signifie Paix et indique le monde de toutes les divinités. Nous avons vu également que la Croix Druidique représentait la triple enceinte sacrée. Celle-ci se retrouve de l'époque protohistorique jusqu'à l'époque gallo-romaine. Les enceintes rondes sont toutefois rares et ne concernent que les enclos religieux. Nous voyons, par exemple, la capitale irlandaise Tara entourée d'une triple enceinte symbolisant les trois mondes. Dans le domaine religieux, elle représente les trois degrés du sacerdoce druidique : Bades, Ovates et Druides. Nous avons vu que la plaine avait la forme d'un quadrilatère, qu'en son centre se trouvait le palais royal avec le temple de Poséidon et de Clito, qu'une enceinte circulaire fermait le tout, que des cours d'eau traversant la plaine coupaient celle-ci en ligne droite et allaient se jeter dans la mer par les deux extrémités, qu'en plus nous y trouvons deux sources ; nous avons donc là la parfaite représentation de la Croix dite du Dendrophore.
Voici maintenant l'agencement de l'acropole où se trouvait le palais royal : «Au centre même de l'acropole il y avait un temple consacré à Clito et à Poséidon. L'accès en était interdit et il était entouré d'une clôture d'or.» Nous retrouvons, là, l'enceinte sacrée des druides et la description de la Croix et de son centre. Au centre de l'île, donc au milieu du temple, se trouvait une colonne d'orichalque sur laquelle était gravée la loi donnée par Poséidon. Le temple devenait donc un Omphalos. C'est donc la représentation de l'Incréé, Créateur de toute chose. Platon écrit, d'ailleurs: «Dieu, interprète traditionnel de la religion, s'est établi au centre et au nombril de la terre, pour guider le genre humain.» Nous savons, d'autre part, que l'omphalos des Celtes était un menhir, donc un pivot. L'omphalos était encore le centre du microcosme humain. Le menhir, dans la tradition celtique, représentait le ‘Grand Druide’ et était dressé en son honneur. César nous dit qu'il représentait le Mercure gaulois ? alias Lug… Le dieu Lug est préceltique et il est représenté par la civilisation Ligure. Le dolmen se dresse à la limite de la terre des vivants face à la plaine heureuse. Le menhir s'apparente à l'arbre de vie et à l'axe du monde.
La Croix Druidique, dite de Dendrophore, se compose de trois éléments essentiels : trois cercles concentriques dont chacun a un diamètre triple de celui qui s'y inscrit immédiatement. N'oublions pas deux éléments essentiels : le point central et le carré formé par les branches de la Croix.
Platon nous précise : «C'est dans ce temple qu'ils (les dix rois de l'Atlantide, issus des cinq couples de jumeaux mâles primordiaux) s'assemblaient tous les cinq ou six ans alternativement, accordant le même honneur au pair et à l'impair. Dans cette assemblée, ils délibéraient sur les affaires communes, ils s'enquéraient si l'un deux enfreignait la loi et le jugeaient » Seule la civilisation druidique présente tous ces aspects. De plus, le calendrier druidique se compose de la façon suivante : un mois représente (6 x 5) 30 jours, un lustre représente 30 ans. Ce fut la découverte, au siècle dernier, du calendrier de Coligny, petit village de l'Ain, qui nous a permis de mieux comprendre la division du temps par les Druides. D'autre part, nous savons que les Druides divisaient la journée en nuit et jour, et qu'elle valait 24 divisions, soit 12 de jour et 12 de nuit. Ce calendrier est ‘soli-lunaire’; La semaine gauloise ou Druidique commençait avec la première lune et se terminait avec la pleine lune. Elle correspondait à une période de 15 jours. Le jour Druidique (L'Iathe) était divisé, comme nous venons de le voir, en 24 sections appelées lot. L'année se divisait en 12 parties correspondant au mois lunaire. Pour faire coïncider l'année lunaire à l'année solaire, les Druides utilisaient la division par le nombre 5. Tous les cinq ans, un mois intercalaire était utilisé. L'inventeur de ce calendrier fut le dieu LUG. Nous ne donnons, ici, qu'un raccourci du calendrier Druidique. Nous voyons donc que ce calendrier est bien une continuation de la Tradition ‘Atlantéenne’ et que les Ligures furent bien les dépositaires de cette tradition primordiale, comme le disaient très justement Paul Le Cour et Phileas Lebesgue. Nous sommes loin des élucubrations de nos pseudo druidisants modernes.
Nous avons donc la confirmation que les Druides sont antérieurs aux Celtes et qu'ils furent bien les seuls dépositaires de la Tradition Primordiale Atlante. Les textes de Platon et surtout son Critias, sont, pour nous, une véritable mythologie, c'est-à-dire un récit ou une histoire logique en tous points de notre passé, Mythos - ‘récit ou histoire’- et Logia -‘logique’-. Alors !
G. Moreau de Waldan

Celtic mythology.

The serpent is an important motif in Celtic myths and legends on all sides of the Irish Sea, despite the biological lack of snakes in Ireland. Eels, however, are common across Europe and are creatures of the otherworld of the sea and the waters that can amphibiously crawl overland. Words for ‘eel’ in Celtic languages are related to the Greek word for serpent “ophis”. Where serpents are mentioned in Irish myths, it is often in connection with water or the sea. This ties in with Classical Romano-Celtic iconography, in which serpentine beings are seen alongside the goddesses of rivers and wellsprings, or they are shown as symbols of chthonic or originative and self-regenerative elements. Here then, once more, we see a connection between the watery domain and the underworld of the ocean of the deep and forgotten past of giant progenitors.
Le serpent est un motif important dans les mythes celtiques et des légendes sur les côtés de la mer d'Irlande, malgré l'absence biologique des serpents en Irlande. Toutefois, les anguilles, sont communs dans toute l'Europe et sont des créatures de l'autre monde de la mer et les eaux qui peuvent amphibiously ramper par terre. Mots pour « anguille » dans les langues celtiques sont associés à du mot grec signifiant serpent « ophis ». Où les serpents sont mentionnés dans la mythologie irlandaise, c'est souvent en rapport avec l'eau ou la mer. Cela s'inscrit dans l'iconographie classique Romano-celtique, où êtres serpentines sont vus aux côtés des déesses des rivières et des sources, ou on les trouve sous forme de symboles des éléments chthonic ou inventif et auto. Puis, une fois de plus, nous voyons ici un lien entre le domaine aquatique et la pègre de l'océan du passé profond et oublié des progéniteurs géants.