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jeudi 6 juin 2013
Le tombeau de Roland
Le tombeau de Roland
Aetius continue ses recherches sur Roland. Après les articles consacrés à "Roland et le vrai Roncevaux" et "L'expédition en Espagne de Roland", il nous livre son étude sur son tombeau proche du Pas de la Roque à Lavaldieu !
L'histoire officielle :
L'histoire officielle nous raconte que le valeureux comte Roland tué au combat à Roncevaux est enterré à Blayes (Girondes), en l'église Saint Romain de Blayes pour être plus précis. Cette église se situe non loin de la voie romaine qui va à Roncevaux. C'est donc « le chemin » de pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle. Comme c'est pratique !
Le conte Olivier y serait enterré ainsi que l'archevêque Turpin. Tous les trois auraient été ramenés de Roncevaux par Charlemagne et mis dans des sarcophages de marbres blanc.
Pique de la ValdieuLa Pique de la Valdieu - Aetius ©
« Passent Nerbone par force et par vigur;
Vint a Burdeles, la cité de
Dessus l'alter seint Sevrin le baron
Met l'oliphan plein d'or e de manguns :
Li pelerin le veient ki la vunt.
Passet Girunde a mult granz nefs qu'i sunt;
Entresque a Blaive ad cunduit sun nevold
E Oliver, sun noble cumpaignun,
E l'arcevesque, ki fut sage e proz.
En blancs sarcous fait metre les seignurs :
A seint Romain, la gisent li baron;
Vivement et en vainqueurs ils passent par Narbonne.
Puis Charle sarrive à Bordeaux, la grande et belle ville.
C'est làque sur l'autel du baron Saint Severin
Charles dépose l'olifant, qu'il avait rempli d'or et de mangons;
Et c'est là que les pélerins peuvent encore le voir.
Sur de grandes nefs l'Empereur traverse la Gironde;
Il conduit jusqu'à Blaye le corps de son neveu,
Celui d'Olivier, le noble compagnon de Roland,
Celui de l'archeveque, qui fut si preux et si sage.
On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc,
A Saint Romain, ou maintenant encore gisent les barons; »
(« La Chanson de Roland »)
Seulement il y a un hic ! Le comte Olivier n'a jamais existé, il n'a été créé de toutes pièces que comme caractère antinomique. Roland est preux, Olivier est sage.
De même que si Olivier n'existe pas, la belle Aude, fiancée de Roland et sour d'Olivier n'existe pas non plus. Elle aussi fut créée de toutes pièces pour adoucir une histoire un peu trop guerrière.
L'archevêque Turpin, le prêtre-soldat qui guerroie en priant, lui a bien existé. Il occupait à la fin du VIIIème siècle le siège de l'archevêché de Reims. Il est mort de sa belle mort dix ans après Roncevaux auquel il n'a jamais participé.
Quant à Roland, Francois Ier, curieux de voir les restes d'un si grand héros, fit ouvir son sarcophage. Stupeur ! En lieu et place d'un squelette de grande taille, il ne trouva qu'un tas d'osselets à peu près gros comme deux fois le poing. Curieux. non ?
Pique de LavaldieuLa Pique de la Valdieu - Aetius ©
Des documents probants :
- Dans la Karlamagnus Saga ou Saga de Charlemagne (recopiée et remaniée en Islande au XIIIème siècle), Charlemagne fait enterrer Roland et les douze pairs à Arles aux Alyscamps.
Le mot provençal « Alyscamps » signifie « Champs Elysées ». Il fait référence au passé antique de ce lieu. En effet, dans tout l'angle sud-est de la ville romaine d'Arles s'étendait, à l'extérieur des remparts une vaste nécropole qui, au Moyen Âge, eut un très grand rayonnement dans l'Occident chrétien.
Dans l'Antiquité, les cimetières étaient toujours extérieurs à l'enceinte des cités et souvent implantés le long des grands axes routiers. Dès le début de l'Empire, tombes à incinération, sarcophages et mausolées s'égrenèrent aux abords de la Via Aurelia, constituant une vaste nécropole.
« Le roi Charlemagne fit ensuite aménager de nombreuses et vastes tombes à l'endroit même où ils avaient trouvé la mort, et il fit ensuite enterrer les corps de ses hommes. Il y fit mener chacun d'eux, au plus près, en fonction de l'endroit où ils se trouvaient, hormis Roland et les douze pairs. La nuit suivante, les anges de DIEU dirent à Charlemagne en rêve que tous les hommes de sa troupe étaient sauvés.
Le roi fit ensuite fabriquer de grandes bières parfaitement parées et il y fit déposer les corps de Roland et des douze pairs et barons qui avaient trouvé la mort; et il fit mettre en bière les corps des douze hommes et partit en compagnie de sa troupe en grande pompe et avec les honneurs. Ils firent route jusqu'à ce qu'ils parviennent à la cité d'Arles, c'est la capitale du pays appelé Provence. » (Karlamagnus Saga)
Pech de la RoqueLe Pas de la Roque - Aetius ©
La Karlamagnus Saga puise ses sources dans des récits plus anciens que la « Chanson de Roland », sources sans doute perdues pour nous, hélas !
Ne dit-on pas que Taillefer, le bouffon de Guillaume le Conquérant, se serait avancé vers les rangs saxons en récitant les exploits du courageux paladin, avant de plonger sa lance dans le corps d'un saxon ce qui signa, d'une part, son arrêt de mort et, d'autre part, le « coup d'envoi » de la bataille d'Hastings. Ceci se passait en l'an de grâce 1066 .
Turold ne composa la « Chanson de Roland » que quelques années plus tard. Où Taillefer avait-il eu donc vent des exploits de Roland, sinon dans une version ancienne d'une Karlamagnus Saga.
La Karlamagnus Saga est en norrois, langue des Scandinaves, langue aussi des envahisseurs normands. Je rappelle que la langue norroise était en vigueur dans tout le duché de Normandie à cette époque (Rouen, Caen). Turold étant moine à Fécamps, il se peut qu'il ait recopié et arrangé une Saga de Charlemagne ancienne pour en faire la « Chanson de Roland ». Cela reste une hypothèse.
Nous disions donc que, dans cette Saga, Charlemagne fait enterrer Roland aux Alyscamps d'Arles. Une légende fait en effet état du tombeau de Roland et de ses compagnons d'armes à cet endroit. Il y a bien un Roland enterré aux Alyscamps d'Arles; oui, mais. ce n'est pas le nôtre !
- Jacques Chocheyras « Roland du Saint au Héros historique » (1993) :
Pas de la RoqueLe Pas de la Roque - Aetius ©
« Nous connaissons un Rotlandus historique, champion de la lutte contre les Sarrasins de surcroît. Il s'agit de l'Archevêque d'Arles qui, apprenant le débarquement de pirates païens dans un port de Camargue qui leur était familier, alla inconsidérément s'enfermer dans un fortin de terre hâtivement construit pour défendre sa riche abbaye de Saint Césaire. Plus de trois cents de ses hommes y périrent, et lui-même, capturé et emmené sur leurs bateaux pour être échangé contre une rançon, y mourut le 19 septembre 869. Son corps reposait au Moyen-Age dans la crypte de Saint Honorat aux Alyscamps. »
Il y a même une Tour de Roland. On crut enfin que la Tour de Roland rappelait le neveu de Charlemagne. En réalité, c'est à l'archevêque Rotland qu'elle doit son nom, à tort du reste, puisqu'elle est l'unique vestige des fortifications établies pendant l'occupation arabe par Abd al-Rhaman. L'archevêque Rotland restaura le monastère fondé par Saint Césaire autour de l'ancienne cathédrale puis ruiné lors de la guerre de 735, et défendit Arles et la Camargue contre les pillards arabes. Il fut fait prisonnier au cours d'un raid sarrasin sur Arles, et l'ennemi réclama, pour le rendre, une énorme rançon que les Arlésiens réussirent non sans mal à réunir. Quand leurs ambassadeurs atteignirent l'endroit convenu, l'archevêque les attendait, assis face au Rhône, hiératique, crossé, mitré, revêtu de tous ses ornements épiscopaux et raidi dans les plis somptueux de sa chape. Les Sarrasins encaissèrent l'argent et se retirèrent aussitôt. Les Arlésiens s'approchèrent alors respectueusement du captif qui les attendait toujours, droit, immobile et silencieux. Surpris, ils se hasardèrent à le toucher. Il s'affaissa entre leurs bras. On ne leur avait rendu que son cadavre.
Revenons à Blayes. Le sarcophage de Roland à Blaye devenait un passage obligé par lequel devait passer le pèlerin de Saint Jacques venu du nord ou de l'ouest de la France et de l'Europe. Ce tombeau légitimait l'itinéraire principal pour qui voulait se rendre à Compostelle via Roncevaux. A Blaye, les pèlerins s'embarquaient pour l'Espagne, le tombeau de Roland les invitait à se rendre à Roncevaux pour voir de leurs yeux l'endroit où était tombé le preux paladin et ses douze compagnons. Comme je le soulignais dans le deuxième volet de mon étude, en matière de marketing, nous n'avons rien inventé.
Revenons maintenant à notre beau Razès :
Lauzet - la Valdieu
- Lisons P. Jarnac : « Des historiens hollandais et anglais sont persuadés que Roland, défunt, fut transporté dans une abbaye située à LAVALDIEU, au sud de Rennes-le-Château, ancien lieu où se pratiquait le culte du dieu Baal. »
- Au sujet de ce lieu, voyons ce que le Dr Gourdon nous en dit : « Sur ce même plateau, vers l'ouest, est le hameau de Coume-Sourde et plus au sud celui de Laval-Dieu, à 1 kilomètre de distance et sur lequel il y a une légende.
On racontait qu'il existait autrefois, dans ce lieu appelé quelquefois par corruption Bal-Dieu, un temple érigé au dieu Baal, où les habitants de la contrée se réunissaient pour lui offrir des sacrifices; et l'on est porté à croire que ce temple aurait pu être fondé par les Phéniciens (?) qui ont jeté quelques colonies sur la côte d'Espagne la plus voisine. Il est évident que cette tradition n'a d'autre origine qu'une supposition faite sur le nom même du lieu, aucune trace d'un temple quelconque n'existant dans le hameau. » ("Stations thermales de l'Aude, Rennes-les-Bains", Toulouse 1874, p. 397)
Je dois ajouter qu'il y avait il y a encore deux ans les ruines (murs) d'une ancienne abbaye, ruines depuis détruites au lieu-dit Lavaldieu.
« Les vieux de Rennes se rappellent très bien qu'il existait aux alentours de cet endroit un monticule que l'on nommait « La butte de Roland ».
D'ailleurs un Audois aurait retrouvé une tombe basse sur laquelle le nom de ROLANDUS était encore visible. La sépulture étant envahie par la végétation est difficile à localiser précisément. Elle serait située du côté du ruisseau de Couleurs.
Des archéologues anglais auraient trouvé des traces d'un cimetière carolingien, précisément au même endroit. » ( P. Jarnac, "Les archives du trésor de Rennes-le-Château")
- Un carto-guide Shell des années 80 fait mention du tombeau de Roland à Lavaldieu :« Aux environs - Rennes-les-Bains (13 km à l'est) petite station tapie au creux du canyon de la Salz. Château de Blanchefort (10 km à l'Est); La Valdieu (6 km Sud-Est) lieu présumé du tombeau de Roland »
Pique de la Valdieu
Vue aérienne de la Pique de Lavaldieu
Conclusion provisoire :
La butte de Roland, le vrai Roncevaux au Pas de la Roque, le tombeau de Roland à Lavaldieu serait une légende transmise de génération en génération par les anciens. Et comme le dit un vieil adage, « il n'y a pas de fumée sans feu ».
Est-ce dans la crypte de cette abbaye que Roland, tombé dans l'embuscade du Pas de la Rocque repose ?
On m'a signalé un endroit proche (que je ne citerai pas) où, pendant des travaux (1980), les ouvriers auraient mis à jour un cimetière carolingien. Le toponyme 'Carla' rappelle d'ailleurs le souvenir de Charlemagne et des Carolingiens.
Et si la phrase laconique inscrite par B. Saunière : « 21-9-1891- Lettre de Granès - découverte d'un tombeau - le soir pluie », était la découverte du tombeau de Roland ?
Il n'est pas interdit de rêver !
Cordialement, Aetius
Sources la gazette de Rennes le Château.
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