lundi 11 février 2013

DANS L’OMBRE DES TEMPLIERS



DANS L’OMBRE DES TEMPLIERS


Sources Griffon d'Argent.



CHAPITRE I






PREMIERE RENCONTRE AVEC LES CHEVALIERS DE MALTE


Parfois, le temps ne se prêtait guère à emprunter l'un des innombrables sentiers de randonnée que compte la vallée car, soudain, un épais brouillard pouvait envahir toute la région. Il faut savoir que certains chemins existaient déjà avant que ne viennent ces religieux. Aimer les parcourir, c'est apprendre à mieux connaître leurs tracés, ce qui peut conforter un jugement dans toutes recherches. Combien de fois me suis-je rendu jusqu'à la chapelle romane de Saint-Léger pour y retrouver la sérénité et y rencontrer mes amis de l'ombre.

Ce jour-là, après avoir dépassé le petit hameau du même nom, je commençai à gravir le large chemin empierré qui allait me conduire devant l'entrée de ce très bel oratoire érigé sur la pointe d'un mamelon.    Tournant la clef dans la serrure, j'ouvris la porte laissant découvrir l'intérieur de la chapelle. M'approchant de l'autel, je distinguai huit croix de Malte peintes sur les murs de l'édifice. C’était bien l’empreinte des chevaliers, mais pourquoi ne les avais-je pas remarquées plus tôt ?

Mon attention se porta alors sur l’une de ces croix d’un rouge éclatant. J’avançai lentement ma main de façon à effleurer délicatement de mes doigts cette empreinte indélébile laissée à la postérité. Je pris alors quelques photos tout en m’assurant que celles-ci étaient bonnes, mais… il n’y avait rien ! Pas un seul cliché de ces croix !
Abandonnant les prises de vues pour un instant, je décidai de m’asseoir sur un banc et de réfléchir à cette situation… Il me vint alors l’idée de prendre une photographie du sanctuaire. Cette dernière fut une réussite totale, mais je n’avais toujours pas une seule croix des Chevaliers de Malte sur la pellicule.
Mon regard se posa ensuite sur la statue en bois représentant Saint-Léger, qui fut évêque d’Autun.*1 Après l’assassinat de Childéric II, Ebroïn le fit torturer en lui faisant brûler les yeux et en lui arrachant la langue. Par la suite, il sera décapité près de Doullens puis, réhabilité, il sera solennellement reconnu comme martyr. La chapelle Saint-Léger servira au culte paroissial dès le début de l’année 1590.
A plusieurs reprises, provenant de chaque côté de l’autel, j’entendis murmurer une prière : c’était le Pater Noster.

« Pater noster, qui es in caelis:
sanctificetur Nomen Tuum;
adveniat Regnum Tuum;
fiat voluntas Tua,
sicut in caelo, et in terra.
Panem nostrum cotidianum da nobis hodie;
et dimitte nobis debita nostra,
sicut et nos dimittimus debitoribus nostris;
et ne nos inducas in tentationem;
sed libera nos a Malo. »
Amen

                                                                                                                             1) v.616-679.

Au bout d’un moment, les chuchotements cessèrent, me laissant déconcerté. Pourtant je n’avais pas rêvé !… Il s’agissait bien de voix !... Et ces murmures qui venaient envahir mes oreilles appartenaient très certainement aux Chevaliers de Malte. Peut-être me trompais-je dans mon raisonnement car, à force de fréquenter des lieux saints, on finit par s’inventer toutes sortes de choses.   
Comme à l’accoutumée, continuant ma petite visite, je détaillai du regard une dalle mortuaire qui reposait en guise d’autel, supportée par un  appareillage grossier de grès et de lauze. Cette pierre tombale appartenait                                   
à qui ?... Voilà encore une question à laquelle je ne pourrais peut-être jamais répondre !
Pour l’instant, Saint-Léger n’apportait aucune réponse à mes questions. Il fallait donc continuer mes investigations sur le terrain, commençant mes recherches chez l’habitant. Je savais que, pendant les guerres de religion, les troupes catholiques s’étaient dirigées vers le château de Montclar, empruntant le chemin reliant Seyne-la-Grand-Tour au Col Saint-Jean.


GUERRES DE RELIGION DANS LE PAYS DE SEYNE


Après avoir traversé la Vallée de la Blanche, ils aperçurent au loin la bannière des Seigneurs de Jarente qui flottait sur le donjon. Sans difficulté, ils arrivèrent devant la fortification que la garnison venait d’abandonner la veille. Pénétrant dans la place sans coup férir, ils saccagèrent le mobilier et mirent le feu aux tentures qui s’embrasèrent aussitôt. Puis, ils s’en prirent aux maisons des villageois dont les toitures, faites de bois et de chaume, s’embrasèrent rapidement. Le château et le village furent en peu de temps la proie des flammes.
De là, les catholiques pillèrent, brûlèrent, rasèrent tous les villages qui se trouvaient sur leur passage dans cette belle Vallée de la Blanche. Les  calvinistes et le  Sieur  Baschi, gouverneur  protestant  de  Seyne-la-

Grand-Tour, arrivèrent trop tard. Fou de rage, il entreprit de se venger sur-le-champ en faisant saccager l’église paroissiale et la chapelle des Dominicains de Seyne et ordonna, après avoir expulsé les religieux, de faire incendier la chapelle et l’église paroissiale de Montclar, ainsi que tous les biens qui appartenaient aux Chevaliers de Malte, comme leur résidence, l’abbaye de Pinaudier, et la chapelle Saint-Léger qui se trouvaient au Col Saint-Jean. Une fois les chevaliers partis, les Huguenots se partagèrent leurs terres et leurs revenus. 
Les habitants qui avaient fui Montclar se réfugièrent dans la chapelle Saint-Léger pour empêcher les Huguenots de commettre une folie en incendiant le sanctuaire. Les villageois prétendirent, de ce fait,
que les protestants n’avaient pas le droit de détruire ce qui appartenait aux Chevaliers de Malte. Pour le gouverneur Baschi, il fallait se venger à tout prix, et anéantir tous ces soi-disant lieux de culte qui représentaient cette église romaine, fondée sur l’ambition, l’intolérance et l’injustice.
En ce qui concerne ces pauvres gens, ils durent abandonner   toute  résistance et quitter définitivement leur chapelle. Certains essuyèrent quelques larmes, puis jetèrent un dernier regard sur Saint-Léger avant de s’éloigner dans la campagne. Les soldats du gouverneur Baschi envoyèrent des brandons enflammés dans la nef, mais comme je le raconte, il se passa quelque chose d’extraordinaire car, malgré la bonne volonté des Huguenots pour alimenter le feu, l’incendie ne put ébranler la voûte en tuf de la chapelle. Le sanctuaire était sauvé !
Il m’arrivait fréquemment de me rendre à la chapelle, où je passais de longs moments à méditer sur les affrontements fratricides entre catholiques et protestants. Je déplorais et condamnais fermement ces guerres de religion qui avaient fait d’innombrables victimes innocentes à cause de la folie meurtrière des hommes pour avoir défendu leurs propres convictions. 
L’incendie provoqué par l’incompréhension de Baschi et de ses hommes avait occasionné quelques dégâts à cet étonnant oratoire qui dominait le hameau et le lac Saint-Léger, situés en bordure des forêts de Costebelle, que je connaissais bien pour les avoir traversées en toute saison.
J’imaginais que, si j’avais été présent à cette époque, j’aurais pu découvrir en m’introduisant dans ce haut lieu la porte entrouverte en grande partie calcinée qui tenait à peine sur ses gonds. Les murs étaient plus ou moins noircis par les fumées de la veille. Le mobilier était entièrement brûlé et les quelques tableaux accrochés aux murs évoquant des scènes de la vie du Christ avaient fini aussi dans le feu. Dans la nef, la lourde dalle de l’autel qui reposait sur deux piliers était renversée  et  gisait sur le sol.  Il ne restait plus rien des crucifix, des bougeoirs et des candélabres qui avaient été dérobés pendant la nuit par des gens sans vergogne. Malgré cela, les flammes et la chaleur n’avaient pas eu raison de l’admirable édifice.


DEUXIEME RENCONTRE AVEC LES CHEVALIERS DE MALTE


Le lendemain, après avoir récupéré les clefs chez mon ami Georges, je remontai jusqu’à la chapelle accompagné de Jack, un beauceron de huit ans qui ressemblait trait pour trait à mon chien Cyrus, que j’avais laissé à Toulouse à cause du voyage qu’il aurait fallu lui imposer.
Arrivé sur les lieux, je m’aperçus que la porte était entrouverte. Restant sur mes gardes, je pénétrai à l’intérieur, marchant à tâtons, tout en m’avançant lentement en direction de l’autel. Un halo de brume avait complètement envahi la pièce. Plus j’avançais, plus j’avais l’impression étrange d’être épié dans mes mouvements. La chapelle paraissait beaucoup plus vaste que d’habitude et les bancs avaient totalement disparu. Les murs étaient recouverts d’un crépi blanc et le support de l’autel reposait bien sur deux piliers.
Peu à peu, le brouillard s’estompa  et, avant que celui-ci ne disparaisse complètement, je devinai alors les huit croix de Malte peintes à droite et à gauche de l’autel.*1 C’est alors que des silhouettes tapies  


1) En 1829, un crépissage recouvrit à demi les huit croix de Malte, lorsque des ouvriers restaurèrent l’édifice.
dans l’ombre s’avancèrent vers moi en poussant leur cri de guerre : «Saint-Jean ! Saint-Jean !» Sur ces entrefaites, je sursautai tandis qu’un silence inquiétant retombait subitement dans la salle…
Ils étaient au nombre de huit et portaient une cotte de maille rouge avec une croix blanche à huit pointes sur le côté gauche, tandis que l’un d’entre eux tenait dans sa main droite la bannière de l’Ordre qui représentait aussi une croix blanche. La plupart de ces Chevaliers paraissaient avoir un âge avancé ; il est certain qu’une barbe cachait une partie de leur visage, lequel était amaigri à cause de ces guerres de religion. Leur origine était noble ; vous pouvez me croire !... Comme vous le savez, il y eut d’abord les Chevaliers de l’Ordre Militaire            et Hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, qui devinrent par la suite, les
Chevaliers de Rhodes, puis les chevaliers de  Malte.
            L’un d’entre eux s’adressa à moi avec une voix pleine de douceur 
et des paroles de tendresse. Il me raconta qu’ils avaient été les gardiens du Col Saint-Jean et qu’ils étaient huit. Malheureusement, ils n’étaient pas assez nombreux pour se défendre contre les protestants. Evitant l’affrontement, ils durent négocier amèrement leur liberté. Voyant qu’ils avaient affaire à des moines dont la sagesse mérite le respect, les Huguenots les laissèrent partir sans armes et sans bagages, juste avec leurs servants et quelques chanoinesses, car la grandeur de l’âme, la valeur et toutes les autres qualités pouvaient être communes aux deux sexes. Après les pourparlers, ils abandonnèrent la commanderie et l’abbaye de Pinaudier, incluant l’hôpital et la résidence des chevaliers, la chapelle Saint-Léger, plus toutes les terres et les dépendances de l’Ordre.  Les Huguenots mirent alors le feu à tout ce qui représentait l’église romaine, sauf l’hôpital.
 
- Ils nous ont laissé la vie sauve et je les remercie de nous avoir épargnés, nous ne méritions pas de finir comme de vulgaires coupe-jarrets. Nous avions aussi très peur pour les femmes et les servants, pensant à toute la cruauté que pouvaient  leur faire subir les huguenots. Gloire et louange à notre Seigneur qui les a finalement conduits sur la

voie de la sagesse, afin de ne point apporter le malheur dans notre petite communauté…

Les premiers conflits entre protestants et catholiques éclatèrent à Seyne-la-Grand-Tour mais également dans plusieurs villes de province. Le parti des réformés  encouragea la haine et le fanatisme, insultant les catholiques, menaçant même de tuer un prédicateur jésuite car, il faut dire que la ville de Seyne appartenait aux protestants. Les calvinistes maltraitèrent aussi les dominicains et pillèrent leur monastère. Tortures et meurtres allèrent bon train, allant même jusqu’à enfermer des religieux dans des tonneaux transpercés de clous, qu’ils précipitèrent du haut des collines. Ces désaccords n’épargnèrent malheureusement ni     les réformistes, ni les papistes, car chaque camp poursuivait sans relâche  
son engagement afin de défendre ses propres convictions religieuses. De
nombreux clans s’affrontèrent pitoyablement dans des joutes oratoires pour finir par s’entretuer, une façon peu orthodoxe pour certains de régler définitivement leurs divergences. Finalement, la guerre éclata dans toutes les provinces du royaume en l’an de grâce 1562. Ces affrontements causèrent la mort de plus d’un million de personnes, ainsi que de grands désastres financiers.

- Nous ne sommes jamais revenus à Pinaudier, mes frères et moi, et cela malgré nos demandes constantes. Le Grand Prieur à Arles envoya à notre place dans le pays de Seyne d’autres frères pour reprendre les biens de l’Ordre. L’un des membres de Saint-Jean intenta des procès contre les usurpateurs de façon à récupérer toutes les possessions de la commanderie. Après avoir retrouvé leurs biens, des chevaliers s’installèrent dans l’hôpital, seul bâtiment qui n’avait pas subi les affres de la guerre. Ils restèrent quelques années pour porter assistance aux malades et aux plus démunis. Malheureusement, l’hôpital resta vide sans qu’ils puissent apporter un quelconque soutien à ces nécessiteux car, personne ne fit appel à eux. L’ancienne commanderie devint veuve de ses maîtres. 
        
Je l’écoutais en silence, évitant de faire le moindre bruit pour ne pas déranger cet extraordinaire protecteur des pauvres et des opprimés, lorsque soudainement, les huit croix de Malte s’effacèrent en même temps que disparaissaient les Chevaliers.
 
-         Attendez ! m’écriai-je.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
CHAPITRE II
 
 
 
 
 
 
LE CAUCHEMAR

Une nuit, je fus réveillé en sursaut après un épouvantable cauchemar qui me tourmenta pendant des jours. Cet étrange phénomène commença dans une vaste salle voûtée, au plafond soutenu par des arcs romans. Les images défilèrent devant  moi tandis que j’observais la présence de chevaliers habillés de noir qui veillaient leur compagnon disparu. J’assistais en toute quiétude à cette cérémonie secrète, essayant de me rapprocher le plus possible du défunt, de manière à apercevoir son visage.  Dès que je fus près de lui, un grand effroi s’empara de tout mon être, étant donné que ce mort… c’était moi ! Je peux vous certifier que ces hommes sombrement vêtus ne s’intéressaient même pas à moi puisqu’ils priaient pour l’autre, celui qui était moi !
Les décors changèrent spontanément, et je me revis répétant sans cesse les mêmes gestes, que j’avais déjà faits, il y a quelques mois de cela. La scène était toujours la même puisque je  me retrouvais devant le même cimetière !... Celui de Saint-Léger !
Peu à peu, je devinai l’existence des Hospitaliers qui me relatèrent les exploits de leurs aïeuls lorsque fut créé l’Ordre de l’Hôpital de Saint-
Jean de Jérusalem, il  y a de cela plusieurs siècles. Cependant, il y avait aussi les autres, ceux que l’on nommait les Templiers. Ceux-là attendaient dans l’ombre que la justice leur soit rendue,  que l’église de Rome reconnaisse  ses fautes et efface son mépris et sa haine contre ces chevaliers dévoués qui servirent jusqu’à la fin une cause qu’ils croyaient bonne et juste. Parfois lorsque je reposais, Hospitaliers et Templiers envahissaient mon esprit afin de m’octroyer, par leur sagesse et leur bonté, les enseignements nécessaires afin de continuer à écrire leur histoire.
         Je passai le reste de la nuit à relire les écrits de la veille, me disant qu’il était peut-être préférable de chercher du côté de la chapelle, parce qu’en définitive, jusqu’à ce jour, je n’avais pas encore trouvé l’emplacement d’un prétendu cimetière. Depuis toutes ces années, bon nombre de visiteurs foulaient ce sol sans savoir qu’ils marchaient sur des pierres tombales.


UN CIMETIERRE ABANDONNE


Au petit jour, je décidai de me rendre à la chapelle avec Jack, espérant découvrir ce que je cherchais depuis bien longtemps : l’existence de sépultures anciennes. La première chose que je remarquai en arrivant sur les lieux, c’est que la porte n’était pas entrebâillée comme l’autre fois, elle était bien fermée, ce qui d’un côté me rassura.
 Patiemment, je commençai à sonder le sol avec une barre à mine tout autour de l’édifice. Elle allait me servir ensuite de levier pour décoller les lourdes dalles et à déplacer les blocs de grès. Maintes fois, je tombai sur ce que je croyais être des pierres tombales, je plantai à côté de celles-ci de petits drapeaux de marquage. Cela me prit beaucoup de temps…
Mes efforts furent récompensés… En effet, ce fut vers le milieu             de l’après-midi que je  soulevai  respectueusement  les premières  pierres

tumulaires  qui portaient une croix gravée… J’étais dans le carré des religieux !... Mais alors, ces tombes n’appartenaient ni aux Templiers    ni aux Hospitaliers ! En général, les uns comme les autres étaient inhumés dans leurs abbayes respectives  lorsqu’ils  dépendaient d’une commanderie. A Pinaudier, il y avait bien une abbaye qui appartenait
aux Chevaliers de Malte !... Pourtant les Templiers avaient aussi fondé un établissement à Pinaudier, mais s’agissait-t-il à l’époque de leur propre abbaye ?... Peut-être la même que celle des Hospitaliers ?
La réponse me fut donnée lorsque je redressai une autre pierre sépulcrale, portant une  simple croix à branches égales gravée. Il s’agissait bien de la signature des Templiers ! Avant les guerres de religion, seuls les hommes d’église pouvaient être enterrés à Saint-Léger. Après le conflit, le site reçut alors toutes les dépouilles mortelles des fidèles des environs, puis l’édifice servit par la suite d’église paroissiale.
Je m’attaquai ensuite au carré des non religieux, et cela ne fut pas une mince affaire !... Je venais de comprendre que la commune avait entrepris, il y a quelques années, d’élargir le sentier qui montait jusqu’à la chapelle. Ils creusèrent avec un bulldozer l’étroit chemin, détruisant tombes et stèles sur une grande partie de l’ancien cimetière. Les ossements se retrouvèrent pêle-mêle à hauteur de couches différentes. Des tombes furent écrasées sous le poids de la machine et des stèles funéraires se brisèrent. Les ouvriers retournèrent toutes les dalles pour que les gens ne puissent pas voir les inscriptions. Certaines allaient servir de marches pour faciliter la montée des personnes âgées, et leur permettre d’arriver jusqu’à la chapelle sans encombre.


TROISIEME RENCONTRE AVEC LES CHEVALIERS DE MALTE


Les jours passèrent et mes recherches allèrent bon train. Parfois je partageais mon maigre repas avec Jack, repas qu’il engloutissait à toute vitesse. Nous  rentrions à la tombée de la nuit, et j’étais vraiment satisfait


et heureux d’avoir passé une bonne journée pleine d’émotion. 
Un beau matin,  je retrouvai la porte de Saint-Léger entrouverte. Le même halo de brume avait envahi une fois de plus l’intérieur de la chapelle. Jack, qui m’accompagnait, se mit à grogner et à montrer les crocs. Je le rassurai tout en le caressant, puis il s’apaisa et se coucha devant l’entrée. Je pénétrai alors dans cet endroit sans a priori. Pendant que le nuage vaporeux se dissipait rapidement, je retrouvai les mêmes chevaliers en prière, les mains jointes sur le pommeau de l’épée, la garde dirigée vers l’autel.

- Mes frères !... Après tous ces siècles écoulés, nous sommes toujours en présence de Dieu dans notre modeste demeure de            Saint-Léger… Lui  qui  a  donné  son  amour pour  tous   les hommes  et
particulièrement à nos frères et sœurs… Méditons en silence en terminant par la prière des Chevaliers de l’Ordre de Malte…

L’homme s’interrompît un court instant, me jeta un regard de bienveillance, puis reprit :

- « Ô Saint-Jean, obtiens-nous une totale confiance en Dieu pour mieux comprendre que l’Amour est plus fort que tout ! Obtiens-nous un cœur humble et simple pour découvrir comme toi les richesses de l’Evangile ! Obtiens-nous un esprit attentif et ouvert pour porter comme toi, dans une prière fraternelle, les appels de tous les hommes, nos frères !... Amen. »

Le Chevalier s’avança alors vers moi et ajouta :

- Nous savons que tu es un homme respectable, et c’est pour cela que nous nous sommes présentés à toi.  Nous savons aussi que tu cherches à connaître l’histoire des frères du Temple qui ont passé une partie de leur vie dans ce haut lieu de prière. Une fois que tu auras trouvé ce que tu désires, tu apprendras  alors  la vérité sur les Templiers ! Quand

tu quitteras cet endroit, tu remarqueras sur ta droite, à mi-hauteur de l’escalier, une grosse pierre … Elle t’indiquera la voie à suivre ! 

Me rappelant les dernières paroles du Chevalier, je descendis avec mon fidèle compagnon les trois premières marches où se trouvait cette fameuse pierre. Incontestablement, elle ressemblait étrangement à une borne gravée. J’en observai donc le moindre détail ; il est vrai que j’étais passé devant très souvent sans me rendre compte qu’il y avait en définitive deux inscriptions gravées sur ce grès.
La première représentait bien une croix templière à branches égales, finement travaillée, la même que celle qui était gravée sur la   dalle mortuaire du carré des religieux. Quant à la deuxième, elle était le
prolongement très grossier de la croix du Christ sur le Golgotha. Ainsi, quelqu’un avait voulu effacer l’une des traces de l’Ordre du  Temple. 
Je jugeai que cette pierre n’était pas à sa place. Elle avait sûrement été déplacée pour arriver à l’endroit où elle se trouve encore aujourd’hui. Par qui ?... Pourquoi ?... Des questions qui resteront peut-être sans réponses. Ah ! si les pierres pouvaient parler, elles nous en raconteraient des choses ! D’après les dires du Chevalier de Malte, la voie à suivre semblait être facile mais, pour moi, cela me paraissait bien compromis.  Comment cette borne pouvait-elle me guider ? Cela n’allait pas être évident pour mener mes investigations !


COMMANDERIE TEMPLIERE DE PINAUDIER


Les jours s’écoulèrent, et j’en étais au même point avec la pierre. J’avais beau la considérer sous tous ses angles, il n’y avait rien, pas la moindre autre trace. Je réfléchis longuement à la chose mais rien de précis ne me venait à l’esprit, mis à part qu’après avoir reçu la charge en 1101 de protéger les voyageurs, les Templiers cédèrent aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, leur établissement qu’ils avaient fondé à Pinaudier au début du XIIIe siècle, plus précisément avant l’année 1234. 
Que se passa t-il pour que les moines guerriers quittassent leur résidence, après être restés plus d’un siècle dans la région ? En tous les cas, ce ne fut assurément pas la froidure de l’hiver qui les motiva à prendre une telle décision  mais plutôt leur éloignement et leur isolement par rapport à d’autres établissements. Ils finirent alors par s’ennuyer et se démoraliser. Et pourtant, ils n’étaient pas du tout restés inactifs pendant les premières années qui suivirent leur arrivée.
Tout en redescendant le chemin qui mène au hameau de Saint-Léger, je cogitais longuement sur cette fameuse résidence des Templiers quand j’obtins enfin une  excellente réponse :

         - Merci, Jack ! hurlai-je, tandis que le brave chien me fixait de son regard étonné.

C’était bien ça ! Après plus de cent trente années passées à Pinaudier, les Templiers avaient donc légué aux Hospitaliers leur résidence qui comprenait : la maison des chevaliers, la commanderie avec son abbaye, l’auberge qui permettait aux voyageurs de se restaurer et de se reposer*1et les deux hameaux*2.














1 (Hôpital des Hospitaliers)
2 (Nom donné par les Hospitaliers pour le Col Saint-Jean).







CHAPITRE III






LE VISAGE DE GRES


         Une nuit, un rêve vint troubler le profond sommeil dans lequel je reposais… La borne gravée se manifesta dans un décor identique à celui de Saint-Léger. Lorsqu’elle fut près de ma personne, la pierre de grès se métamorphosa peu à peu, prenant l’apparence d’un visage humain. Un vieil homme m’apparut alors, le visage émacié, marqué par de profondes rides. Par moments ses yeux vitreux devenaient si pénétrants que j’essayais de détourner mon regard, mais en vain, une force inéluctable s’opposait à moi.
Il commença à me relater des faits qui s’étaient produits à Pinaudier, avant que ses frères ne quittent définitivement la commanderie, laissant sous bonne protection, les Vallées de la Blanche et de l’Ubaye aux Hospitaliers.

- Ils ne pouvaient me ramener avec eux, étant donné que je n’aurais jamais supporté le voyage !… J’étais alors très malade ! Ils me laissèrent aux bons soins des moines de   Saint-Jean qui, grâce à leurs efforts et à la

volonté de Dieu, réussirent à me remettre sur pied après m’avoir guéri de tous mes maux… Après quoi, je décidai de rester avec les Hospitaliers, dans cette région que je connaissais si bien pour l’avoir parcourue durant de nombreuses années. Vu mon âge avancé, ils me confièrent alors un petit travail ; celui de vérifier les torchères, les enflammer et les étouffer suivant les différentes heures de la journée. Néanmoins, certains endroits de la commanderie devaient être constamment éclairés…  
 
Son image est toujours présente en moi, et je me rappelle encore les traits de son visage lorsqu’il venait fréquemment,  les nuits, poursuivre son histoire… celle des Templiers.

- Nous étions douze frères et nous gardions le Col Saint-Jean. Parfois nous avions des déboires avec des brigands qui rançonnaient sans cesse de pauvres voyageurs sur les chemins. Nous portions alors de grands coups d’estoc et de taille sur ces impénitents et ces forcenés, maculant de leur sang la neige fraîchement tombée de la veille. Même morts, ils furent pendus haut et court à des arbres pour servir  d’exemple… Sans cesse nous les poursuivions, et cela devenait un jeu pour nous de rivaliser avec l’ennemi comme au bon vieux temps, lorsque nous étions en croisade contre les Infidèles. Nous n’avions pas peur de mourir !... Dieu veillait sur nous ! Suite à notre vigilance et à notre rapidité d’action, les coupe-jarrets, pris d’une grande frayeur, se résignèrent à quitter les deux vallées pour ne plus revenir dans le pays. N’ayant plus d’occupation guerrière, nous reprîmes notre vie monastique. La solitude commença alors à nous peser… Les années passèrent et je me voyais vieillir. Je sentais une immense fatigue me pénétrer… Je ne pouvais plus veiller sur mes frères ni sur notre maison. Après la visite du Commandeur Templier de province, je fus dispensé des matines, mais je devais chanter les treize oraisons ordonnées tout en me reposant. « In conspectu angelorum psallam tibi »*1   Corrections effectuées



1) - «Je chanterai pour toi devant les anges »…
Le souvenir des croisades lui revenait à l’esprit, lui qui participa     à l’une d’entres elles. Il se rappelait aussi avoir lu Fouchet de        Chartres dans son  « Historia Hierosolymitana », où il décrivait le prêche enflammé du pape Urbain II appelant le 27 novembre 1095, l’Occident chrétien à la guerre sainte contre les Infidèles.


DISCOURS DU PAPE URBAIN II  


« Comme la plupart d’entre vous le savent déjà, un peuple venu du Moyen Orient, les Turcs, s’est avancé jusqu’à la Méditerranée, au détriment des terres des Chrétiens. (…) Beaucoup sont tombés sous leurs coups ; beaucoup ont été réduits en esclavage. Ces Turcs détruisent les églises ; ils saccagent le royaume de Dieu. (…) Aussi  je vous exhorte et je vous supplie, et ce n’est pas moi qui vous y exhorte, c’est le Seigneur  lui-même, vous  les hérauts du Christ… Je vous exhorte donc de les persuader tous,  chevaliers, piétons, riches ou pauvres,  par vos fréquentes prédications,  de se rendre à temps  au secours des chrétiens et de repousser ce peuple néfaste loin de nos territoires. Je le dis à ceux qui sont ici, je le mande à ceux qui sont absents : le Christ l’ordonne. A tous ceux qui y partiront et qui mourront en route, que ce soit sur terre ou sur mer, ou qui perdront la vie en combattant les païens, la rémission de leurs péchés sera accordée. Et je l’accorde à ceux qui participeront à ce voyage, en vertu de l’autorité que je tiens de Dieu. Quelle honte, si un peuple aussi méprisé, aussi dégradé, esclave des démons, l’emportait sur la nation qui s’adonne au culte de Dieu et qui s’honore du nom de chrétienne ! Qu’ils aillent donc au combat contre les infidèles, ceux-là qui jusqu’ici s’adonnaient à des guerres                   privées et abusives, au grand dam des fidèles ! Qu’ils soient désormais des chevaliers du Christ, ceux-là qui n’étaient que des brigands ! Qu’ils luttent maintenant, à bon droit, contre les barbares, ceux-là qui se battaient contre leurs frères et leurs parents ! Ce sont les récompenses éternelles
qu’ils vont gagner, ceux qui se faisaient mercenaires pour quelques misérables sous. Que ceux qui voudront partir ne tardent pas. Qu’ils louent leurs biens, se procurent ce qui sera nécessaire à leurs dépenses, et qu’ils se mettent en route, sous la conduite de Dieu, aussitôt que l’hiver et le printemps seront passés.»


LE TRESOR DU TEMPLE DE SALOMON


- C’est ainsi, me dit-il, que répondaient à l’appel pressant du pape, un très grand nombre de chevaliers, de manants et de fanatiques religieux qui se croisèrent sans attendre l’ordre de partir. La plupart d’entre eux ne revinrent jamais et périrent de la main des infidèles, après avoir commis de  nombreuses  exactions  sur   leur  passage.  Cependant, une grande armée aux ardeurs belliqueuses se mettait en marche,  afin de libérer tous les lieux saints de la Palestine. A l’issue de sièges mémorables, les Croisés prirent Edesse, Antioche et Jérusalem, où les pillages et les massacres se succédèrent. Baudouin  I, comte d’Edesse fut  proclamé    roi de  la  ville  Sainte  de Jérusalem,  à  la  place de son frère, le preux Godefroy de Bouillon qui en avait refusé le titre... Sous le règne de Baudouin II, cousin du premier comte d’Edesse, un moine s’intéressa     de très près au Temple de Salomon ; c’était Bernard de Clairvaux,        un cistercien qui gérait les affaires de Dieu, comme si s’étaient les siennes, et qui possédait depuis longtemps aux yeux de tous, un savoir particulièrement approfondi sur le Proche-Orient. Ainsi, avec l’aide de ce dernier et le soutien du comte de Champagne, Hugues de Payns Chevalier Champenois fonda avec ses huit compagnons en Terre Sainte, l’Ordre des Pauvres Chevaliers du Christ et du Temple de Salomon. Leur but étant de protéger les pèlerins contre les infidèles, d’assurer la surveillance de la route qui menait de Jaffa à Jérusalem, et de monter une garde vigilante dans  les lieux saints et le Saint-Sépulcre. Pour cela,               ils devaient respecter  la règle  de Saint-Augustin qui s’appuyait sur trois

vœux, chasteté, pauvreté et obéissance. Les plus importants d’entre eux furent : Hugues de Payns qui deviendra plus tard, Grand-Maître de l’Ordre du Temple, André de Montbard, Godefroy de Saint-Omer, Payen de Montdidier et Archambaud de Saint-Amand… Dès leur arrivée à Jérusalem, Baudouin II  fit  installer ces «Craignant Dieu » dans l’une des salles du palais, jouxtant l’ancienne mosquée Al-Aqsa sur l’esplanade du Temple de Salomon. Une fois sur place, ils ne participèrent à aucun combat et laissèrent sans vigilance la route pèlerine. Ils menèrent pendant neuf années une vie religieuse auprès     des chanoines de  Saint-Augustin ; existence qui allait changer à jamais la destinée de ces moines guerriers… Un jour, en nettoyant les écuries, l’un d’entre eux constata qu’à certains endroits le sol était  creux. Intrigué par cette hasardeuse découverte, il commença à ôter quelques  pierres de pavement mal jointées, et appela ses compagnons à  la  rescousse pour  déblayer toute la terre qu’ils réussirent à évacuer au fur et à mesure qu’ils creusaient  profondément. Au bout de quelques mois de travail acharné, ils entrevirent enfin le prodigieux réseau de galeries souterraines qu’ils venaient de mettre au jour. Hugues de Payns et ses huit compagnons n’étaient pas venus en Terre Sainte pour combattre,  mais  pour découvrir l’emplacement  du trésor du  Roi Salomon,  et cela,  sans éveiller  l’attention des  gens de leur entourage, car ils avaient pour devoir de retrouver l’Arche d’Alliance et les Tables de la Loi … La journée ils creusaient sans s’arrêter, se relayant dès que l’un d’entre eux commençait à montrer des signes de fatigue. Certains passages conduisaient dans  des pièces complètement vidées  de leurs biens par les
légions romaines de Titus. Pourtant dans l’une des galeries souterraines, les Chevaliers du Christ réussirent à dégager une porte monumentale qui donnait accès dans une très grande salle. De nombreuses colonnes   parées du sceau de Salomon, supportaient une enfilade de voûtes recouvertes   de mosaïques. Ils pénétrèrent  dans ce lieu sacré, où une odeur de renfermé pénétrait leurs  narines, tandis  qu’ils  découvraient  abasourdis  des  tombeaux dignes de recevoir de   grands  rois. Une poussière  épaisse  recouvrait  toute la  surface du  sol et  tous les objets

 inestimables que pouvait contenir l’une  des parties du Temple de Salomon. Sachant qu’ils avaient enfin atteint leur but, ils n’en crurent pas leurs yeux et se mirent à rêver. Bernard de Clairvaux avait eu raison de croire que le Temple de Salomon comprenant plusieurs salles n’avait pas entièrement été pillé par les hordes romaines. Ils trouvèrent des reliques et des trésors de toutes sortes qui les attendaient patiemment, car ces fils de lumière allaient connaître richesse et gloire. Plusieurs monceaux constitués d’or et d’argent provenant de prises de guerre étaient rassemblés  çà et là. On pouvait y voir aussi du cristal, des pièces de monnaie, de l’orfèvrerie, des bijoux, des rouleaux de parchemins, la couronne des rois de Jérusalem, le chandelier à sept branches de Salomon, l’Arche d’Alliance contenant les Tables de la Loi... Cependant, Hugues de Payns remarqua parmi les tombes, une sépulture qui ne s’apparentait pas tout à fait aux autres. Elle ne possédait aucun ornement décoratif qui puisse attirer le regard au premier abord. Il sollicita l’aide de ses Frères pour déplacer la dalle mortuaire, de façon à savoir qui était le personnage enseveli dedans. Le squelette d’un homme de grande taille  apparut alors. A ses côtés se trouvaient des rouleaux de parchemin prouvant sa descendance dans la lignée de David, et son appartenance au trône de Jérusalem en tant que Roi des Juifs. A la lecture des manuscrits, tous les chevaliers du Christ furent déconcertés et bouleversés par cette mystification de l’église romaine, destinée à duper les peuples pour détourner à son profit richesse et pouvoir. Quant à Jésus, c’était un simple mortel qui n’avait jamais ressuscité, comme on voulait bien le faire croire, et malgré tout ce que l’on pouvait en dire. Juste après sa mort, il fut descendu de la croix et mis au tombeau. Voulant préserver sa postérité et sa précieuse identité, ses disciples que l’église désigne par le mot « apôtres », déplacèrent sa dépouille pour la mettre en sûreté dans le Temple de Salomon, parmi les siens... Jésus n’était rien d’autre qu’un prophète ; le messager d’un Dieu Unique, mais éminemment humain qui entreprit avec ses adeptes de libérer la Palestine de l’emprise romaine du temps de Pilate, procurateur de Judée. Celui-ci le fit  d’ailleurs crucifier pour  avoir  tenté de soulever le  peuple contre l’autorité de Jérusalem, et

pour  les crimes qu’il  avait pu  commettre avec les  Zélotes  à  l’encontre des  Romains.  Il se battit contre le pouvoir en place et se dressa aussi contre les pharisiens, afin que sa descendance soit reconnue et que justice lui soit rendue…Ce jour là, alors que Hugues de Payns et André de Montbard  examinaient la tombe du Roi des Juifs, afin d’apporter de nouveaux éléments sur la fausse résurrection de celui-ci, les moines Chevaliers entreprirent de dégager précipitamment l’Arche d’Alliance cachée sous un amoncellement d’objets précieux. André de Montbard, l’oncle de Bernard de Clairvaux, les en empêcha juste à temps, en leur disant    qu’il ne fallait surtout pas ouvrir l’Arche pour prendre les Tables de  la Loi,  car  elles sont la connaissance  suprême que  Yahvé, le Dieu d’Israël donna à Moïse, et qu’elles constituaient la puissance du peuple Hébreux… Il leur expliqua que lorsque Salomon succéda à David, il      fit construire le premier Temple en l’honneur de Yahvé, et mit  l’Arche dans une salle secrète et obscure, où elle y resta enfermée pendant de très nombreuses années. Puis vinrent les invasions  avec Nabuchodonosor,  roi  de Babylone  qui  détruisit  entièrement la ville de Jérusalem. Il fallut attendre quelques siècles pour que le roi de Perse, Cyrus le Grand, autorisât la reconstruction du deuxième Temple de Salomon qui fut profané par la suite et réédifié. Alors arrivèrent un jour, Titus et ses légions romaines qui mirent le feu au troisième Temple, après avoir emporté une grosse partie du trésor se trouvant dans les souterrains de la maison de Yahvé... Ainsi la coïncidence voulut que les neuf Chevaliers trouvent l’emplacement du Temple de Salomon, et suivant les indications et les recommandations de Bernard de Clairvaux, ils ne devaient en aucun cas toucher ou ouvrir l’arche d’Alliance sous peine de mort brutale. L’Arche était recouverte d’un voile de protection très épais, car elle était porteuse d’une énergie divine. Seuls les Lévites, prêtres de l’ancien royaume  d’Israël pouvaient la transporter à l’aide de barres en bois d’acacia plaquées d’or. Le coffre était lui aussi fait en bois d’acacia plaqué d’or, et à chaque extrémité se trouvait un chérubin d’or qui gardait le propitiatoire, par lequel le Seigneur pouvait communiquer ses ordres aux enfants d’Israël. Dans l’Arche, il y avait les pierres gravées

par la main de Dieu sur le Sinaï, mais aussi le livre de la Tora écrit par Moïse... Tout cela, André de Montbard le savait. Il comprenait aussi que les Pauvres Chevaliers du Christ et du Temple de Salomon n’étant pas initiés, allaient tôt ou tard être confrontés à une délicate situation. Avec Hugues de Payns, ils se demandèrent comment allaient t-ils faire pour emmener l’Arche sans encombre jusque dans le royaume de France, et, sans succomber au terrible pouvoir qu’elle exerçait sur les hommes... Pendant les jours qui suivirent, mes Frères analysèrent toutes les éventualités néfastes pouvant émaner de la dangerosité de l’Arche. Ils prirent d’énormes précautions en se protégeant les bras et les mains, et rajoutèrent plusieurs voiles de protection sur la demeure du Seigneur. Ils glissèrent alors les longues barres d’acacia dans les anneaux de l’Arche, prévus à cet effet, puis la soulevèrent et la déplacèrent progressivement dans les couloirs, afin de la sortir du Temple de Salomon.  Après tant d’années, la question était de savoir si l’Arche abandonnée dans l’une des salles dérobées du Temple, était toujours habitée par cette énergie divine que représentait Yahvé ? La plupart d’entre eux considérèrent que la Maison du Seigneur avait perdu tout  son pouvoir. C’est alors que nos Frères se rappelèrent des avertissements de Bernard de Clairvaux, concernant l’interdiction absolue d’ouvrir le propitiatoire afin de récupérer les Tables de la Loi. Sans toutefois éveiller les soupçons, l’Arche fut chargée sur une charrette, pour la ramener dans le royaume de France et la déposer dans un endroit secret que leur communiquerait Bernard de Clairvaux. Quatre d’entre eux restèrent à Jérusalem, tandis que les autres prirent le chemin de la mer pour débarquer dans le Midi, tout près de Narbonne. Ils emmenèrent aussi, quelques coffres remplis d’inestimables trésors, et transportèrent la dépouille de Jésus dans le plus grand secret.

« l’Eternel avait dit à Moïse : l’Arche devra être en  bois d’acacia,             sa longueur sera de deux coudées et demie, sa largeur d’une coudée et                 demie, et sa hauteur d’une coudée et demie. Tu la couvriras  d’or pur,           tu la couvriras en dedans  et en  dehors, et tu y feras une bordure d’or tout
autour. Tu fondras pour elle  quatre anneaux d’or, et tu les placeras à ses quatre coins, deux anneaux d’un côté et deux anneaux de l’autre côté. Tu feras des barres en bois d’acacias, et tu les couvriras d’or. Tu passeras les barres dans les anneaux sur les côtés de l’Arche, pour qu’elles servent à porter l’Arche ; les barres resteront dans les anneaux de l’Arche, et n’en seront point retirées. Tu mettras dans l’Arche le témoignage, que je te donnerai. Tu feras un propitiatoire d’or pur ; sa longueur sera de deux coudées et demie, et sa largeur d’une coudée et demie. Tu feras deux chérubins d’or, tu les feras d’or battu, aux deux extrémités du propitiatoire ; fais un chérubin à l’une des extrémités et un chérubin à l’autre extrémité ; vous ferez les  chérubins sortant du propitiatoire à ses deux extrémités. Les chérubins étendront les ailes par-dessus, couvrant de leurs ailes le propitiatoire, et se faisant face l’un à l’autre ; les chérubins auront la face tournée vers le propitiatoire. Tu mettras le propitiatoire sur l’Arche, et tu mettras dans l’Arche le témoignage, que je te donnerai. C’est là que je me rencontrerai avec toi ; du haut du propitiatoire, entre les deux chérubins placés sur l’Arche du témoignage, je te donnerai alors tous mes ordres pour les enfants d’Israël. »
 http://boutic.annik.1tpe.fr

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